Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 75.djvu/889

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
L'ALIMENTATION DE PARIS

II.
LES HALLES CENTRALES[1]

« Le pilori du roi est aux halles de Paris. » Cette phrase, qui se retrouve dans plus d’un vieil historien, apprend à qui les marchés appartenaient avant la révolution. C’était en effet le seigneur justicier qui seul dans les communes avait le droit de faire élever des halles et d’en percevoir le produit. On se montrait jaloux de ce privilège, et il était rare qu’un instrument patibulaire ne se dressât pas, comme un signe de possession redoutable, sur la place même où les marchands apportaient les denrées premières indispensables à la vie. Le prieur du Temple, l’abbé de Sainte-Geneviève, l’abbé de Saint-Germain-des-Prés, avaient aussi leur pilori sur les marchés relevant de leur territoire. La loi du 28 mars 1790 abolit régulièrement cet usage féodal que la révolution avait renversé dès les premiers jours d’août 1789. Le pilori royal était situé à l’endroit où se fait aujourd’hui la vente à la criée du poisson de mer. C’était une tourelle octogone coiffée d’un toit en éteignoir. Sur la plate-forme, une roue horizontale percée de trous était portée sur un moyeu à pivot. Dans les trous, on faisait entrer la tête et les mains du patient, on mettait la roue en mouvement, et le malheureux était ainsi montré circulairement et méthodiquement aux regards de la foule. Le pilori offrait un spectacle fort recherché de la

  1. Voyez la Revue du 15 mai.