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ont fait les plus louables efforts pour amener le nombreux personnel dont ils sont responsables aux idées d’association, aux sociétés de secours mutuels, aux caisses de retraite. Dans cette voie où la seule force du raisonnement est mise en action, les progrès s’effectuent avec lenteur ; mais la marche est constante. L’administration du reste ne s’épargne pas. Chaque jour, un médecin fait la visite gratuite des malades, qui au besoin reçoivent les médicamens ordonnés. De plus, on a établi des crèches pour les enfans des ouvriers et des classes d’adultes où ces ingénieurs, ces savans sortis aux premiers rangs de la plus célèbre école du monde ne dédaignent pas de donner sur toutes choses des notions élémentaires et pratiques aux humbles travailleurs dont la direction leur est confiée.


IV

Il y a autant de différence entre les tabacs qu’entre les vins, et le caporal de cantine, vendu 1 fr. 50 le kilo., peut être comparé au vin de Suresne, comme certains cigares de La Havane qui coûtent 355 francs le kilogramme sont naturellement assimilés aux grands vins produits par la Bourgogne et la terre de Médoc. Si le monopole a pour but d’enrichir l’état, il a pour devoir de satisfaire à toutes les exigences de la consommation, et c’est ce qu’il essaie de faire depuis sept ou huit ans avec une persévérance à la fois digne d’éloges et très habile. Il est en effet de son intérêt de se placer si bien au-dessus de toute concurrence que celle-ci ne soit plus possible. L’introduction des tabacs n’étant point interdite en France et tout le monde pouvant en faire venir à la condition d’acquitter un droit de 24 francs par kilogramme de cigares et de 10 francs par kilogramme de tabac fabriqué, la direction verrait diminuer promptement le débit des cigares de luxe, si les siens n’étaient supérieurs à tous ceux qu’on peut se procurer, même en s’adressant aux producteurs de Cuba. Quant aux cigares sortis de nos manufactures, s’ils ne sont point irréprochables, ils offrent du moins des qualités qui paraissent du goût du public, car la consommation en a augmenté d’une façon prodigieuse, — un peu plus de 200 millions en 4852, 761,625,000 en 1867. C’est pour l’état un bénéfice régulier au premier chef. En effet, l’impôt qui frappe les tabacs est un impôt absolument volontaire qui n’atteint aucune denrée de nécessité indispensable. C’est là le caractère particulier et excellent de cette taxe. L’Allemagne, où ce genre de commerce est libre, nous envie notre système, elle l’a mis à l’étude, et il est fort probable que d’ici à très peu de temps elle l’adoptera. Il suffit de voir ce que le monopole a produit depuis qu’il existe chez nous pour en