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Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/412

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L’état du marché où l’argent se resserre exerce ainsi une action décisive sur le change ; l’offre des effets augmente, et la demande diminue.

Nous avons parlé des effets à vue, afin d’étudier d’abord l’influence dominante de la somme des engagemens respectifs, en éliminant les causes accessoires, souvent fort actives, qui modifient le cours du change, tel qu’il résulte du simple rapprochement de l’actif et du passif, ainsi que du calcul des frais d’envoi du numéraire. Quand, au lieu des effets à vue, on négocie des effets à échéance plus ou moins rapprochée, celui qui les achète doit subir la perte de l’intérêt des avances jusqu’au moment du remboursement. S’il veut devancer ce moment, il faut qu’il fasse escompter le billet au taux de la place où le paiement doit avoir lieu. C’est ainsi que le taux de l’escompte dans le pays débiteur modifiera le prix des effets sur la place étrangère d’où on les tire ou à laquelle on les a transmis, et il exercera une influence d’autant plus grande que le terme du paiement sera plus éloigné. Les effets longs, c’est-à-dire les effets qui ne doivent être payés qu’à un délai plus ou moins rapproché, éprouvent le contre-coup des événemens qui affectent les effets courts, c’est-à-dire les effets à vue. Ils sont en outre soumis à d’autres et nombreuses influences qui modifient l’expression du cours normal du change d’une place sur une autre. C’est à la cote des effets courts qu’il faut recourir pour connaître la situation monétaire, en la dégageant de l’empire qu’exercent le taux de l’escompte, la date de l’échéance, le mode de paiement, la situation politique.

L’immense majorité des effets se place dans la catégorie de ceux qui sont payables à diverses époques, soit à partir du moment où on les émet, soit à partir du moment où on les présente à l’acceptation. Deux nouveaux élémens entrent dès lors dans la valeur des effets. Celui qui fait l’avance, donnant le prix d’un effet qu’il ne doit toucher qu’à terme, réclame le loyer correspondant du capital, et le touche sous forme de déduction sur le prix de l’effet. En outre la confiance qu’inspire la solvabilité tant du tireur que de l’accepteur se traduit d’une manière différente quand les prévisions doivent s’appliquer aux divers délais de l’échéance ; elle se mesure et sur la situation personnelle du créancier et sur celle du débiteur, garans solidaires du paiement, et sur l’état du crédit dans les deux pays mis en contact. Celui qui achète une lettre de change pour solder une dette doit l’intérêt de celle-ci jusqu’à l’échéance. Il faut qu’il paie la durée du retard. C’est ici que s’applique de la façon la plus directe le dicton anglais, time is money, le temps est de l’argent. Le temps représente d’autant plus d’argent qu’il se prolonge davantage, que