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exprimée en 1800 devant le conseil-général de la Seine, qui avant de commencer ses travaux s’était rendu aux Tuileries : « Le premier consul a témoigné le désir que le conseil-général eût toute l’étendue de temps et de pouvoir nécessaire pour remplir sa destination. Il a rappelé que le conseil-général du département était dans l’ordre de la constitution un contre-poids naturel à l’autorité du préfet, qu’il devait être l’œil du gouvernement comme le préfet en était le bras, qu’il devait par conséquent exercer sa vigilance non-seulement sur tous les actes de l’administration, mais encore sur tous les abus et les défauts de l’ordre public, et se rendre l’organe de ses concitoyens dans l’émission et la publication de tous les vœux, de tous les projets, de toutes les vues, qui peuvent tendre à l’amélioration de la chose publique, qu’il convenait que le conseil-général séant à Paris offrît à tous les conseils des autres départemens une sorte de règle et de type de conduite[1]. » Tel était le langage de 1800. Il ne faut pas non plus oublier qu’à cette époque les conseils-généraux se composaient des hommes qui avaient concouru à la révolution de 1789, que le premier consul avait autour de lui, au sénat, au corps législatif, au tribunat, au conseil d’état, les survivans de la fraction modérée de la constituante, que la notion de liberté était encore vivante dans tous les esprits, et que le régime issu de brumaire ne pouvait justifier l’organisation nouvelle des conseils-généraux qu’en laissant aux membres de ces conseils une latitude d’appréciation et de discussion qui équivalait presque à l’indépendance. Le programme tracé en 1800 par Bonaparte lui-même imposait aux conseils-généraux le devoir d’empêcher le mal et leur donnait le droit de faire le bien. Aussi, tous les historiens sont d’accord là-dessus, il n’y eut point de période plus active, plus laborieuse, plus bienfaisante, que celle du consulat. Pendant trois ans, toutes les intelligences se mirent à l’œuvre, et la France fut réorganisée. Le gouvernement introduisit dans nos codes et dans notre système administratif ce qu’il y avait de pratique dans les idées de 1789 ; au-dessous de lui, les conseils-généraux et les conseils municipaux rétablirent l’ordre dans la gestion des affaires départementales et communales ; Paris en particulier ressentit les bienfaits de ce nouveau régime, qui remplaçait avantageusement les délibérations tumultueuses de l’ancienne commune.

L’empire succède au consulat, et bientôt tout change. A Paris comme ailleurs, le conseil-général siège, délibère, étudie des plans, aligne des budgets ; mais ses votes expirent au souffle d’une volonté toute-puissante. L’empereur assure de sa protection spéciale « sa

  1. Extrait des procès-verbaux du conseil-général de la Seine, session de l’an VIII.