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Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 78.djvu/357

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cheter, et ces nouveaux frais viennent s’ajouter à ceux de transport ; on les trouve résumés dans le taux du change, qui s’élève d’autant plus. C’est ce qui explique comment dans nos rapports avec l’Angleterre le change nous a été plus défavorable lorsque notre circulation métallique était tout en argent que lorsqu’elle a été en or. Il résulte du tableau dressé par M. Juglar qu’à différentes reprises, entre 1819 et 1852, nous l’avons vu monter à 25,80 et même 25,90 pour la livre sterling payable à Londres lorsque le pair est de 25,20. Depuis 1852, nous avons été débiteurs encore plus d’une fois de nos voisins ; mais jamais le change ne s’est élevé plus haut que 25,30 et 25,35, parce qu’au-delà nous aurions envoyé directement notre monnaie d’or, qui est parfaitement reçue. Les 10 ou 15 centimes au-dessus du pair représentent à peu près les frais de transport.

Sans doute les moyens de communication, devenus plus faciles et plus économiques, ont dû contribuer aussi à ce résultat ; mais ils ne peuvent à eux seuls expliquer l’énorme différence de 50 à 60 centimes dans le prix de la livre sterling entre une époque et l’autre. Les difficultés tenant autrefois à la nature de notre monnaie y sont certainement pour beaucoup. Par conséquent il n’est pas tout à fait exact de dire que le maintien du double étalon n’a eu jusqu’à ce jour aucun inconvénient. Il a eu au moins celui de nous faire payer plus cher le change avec l’Angleterre, et il l’aurait bien plus encore dans l’avenir, si par malheur nous n’avions encore que de la monnaie d’argent à offrir à nos voisins. Nos relations ont triplé depuis cette époque, et lorsque nous avons des remises à leur faire, c’est sur une échelle considérable. On nous vante la facilité que donne à nos rapports avec l’Allemagne et la Hollande le maintien du double étalon. Qu’est-ce que cela à côté des embarras qu’il pourrait nous créer avec les pays les plus commerçans du monde, avec l’Angleterre et les États-Unis ? car aux États-Unis aussi, bien que le double étalon existe encore nominalement, il a cessé d’exister en fait, comme chez nous du reste. On ne frappe plus de dollars en argent, et sur un monnayage total en ce métal de 136,351,512 dollars, 4,366,342 seulement sont en pièces de 1 dollar, tandis que 331,098,417 sont frappées en subdivisions de cette pièce.

Enfin on est allé jusqu’à prétendre qu’avec l’argent l’usure, ce qu’on appelle le frai, est moins considérable qu’avec l’or. Rien n’est moins prouvé que cette assertion ; il résulte au contraire d’expériences chimiques et de calculs qui ont été faits avec le plus grand soin que l’argent s’use quatre ou cinq fois plus vite que l’or. En outre, à valeur égale, l’argent coûte plus cher à ex-