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priété est constituée en Angleterre, en Belgique, en Hollande, en Danemark, en Suède, en Prusse, en Bavière, en Suisse, en Autriche, en Russie, en Espagne, en Portugal, en Italie, en Turquie, en Égypte, aux États-Unis, au Chili, que cette grande machine a été mise en mouvement; c’est pour connaître les besoins et les vœux de l’agriculture française. On ne peut d’ailleurs dans quelques pages, si bien résumées qu’elles soient, donner une idée de la législation et de la propriété dans tous les états du monde. L’enquête sur la situation agricole des pays étrangers, ajoutée après coup, mérite un examen à part; chacun des documens dont elle se compose offre aux jurisconsultes et aux économistes une source précieuse d’informations. On devra la consulter quand on voudra traiter à fond chaque question spéciale. Pour le moment, il ne s’agit que d’un aperçu général. M. le directeur de l’agriculture revient à tout moment sur cette comparaison entre la France et les autres pays, les renseignemens empruntés à l’enquête étrangère prennent près de la moitié de son rapport. Nous continuerons à n’en pas parler pour éviter de compliquer un sujet déjà bien chargé de détails.

L’insuffisance des capitaux consacrés aux opérations agricoles a été généralement signalée. Quelles sont les causes de cet état de choses? Quels en peuvent être les remèdes ? « Sur le premier point, dit M. Monny de Mornay, la réponse est partout la même. D’un côté le développement des valeurs mobilières, les facilités de gestion et les avantages de revenus qu’elles offrent, d’autre part la rareté des bras, les difficultés d’exploitation, les conditions du régime hypothécaire, les lenteurs et les formalités qui entourent les saisies immobilières et les ventes judiciaires, toutes ces raisons réunies concourent à éloigner les capitaux de la propriété foncière et même des prêts hypothécaires. Deux autres causes moins généralement signalées, sans doute parce que, datant de plus loin, elles frappent moins les esprits, paraissent cependant avoir une influence au moins aussi large dans le résultat qu’on regrette. C’est pour le petit propriétaire le désir excessif d’accroître sa propriété, désir qui l’entraîne à consacrer ses épargnes à l’acquisition onéreuse du champ voisin au lieu de les faire fructifier par l’amélioration de la terre qu’il a déjà; c’est pour le fermier, et par une raison analogue, l’ambition d’exploiter une ferme dont l’étendue flatte son amour-propre, mais dépasse ses forces. » Si les déposans n’ont pas insisté sur ces derniers points, c’est que l’autorité publique n’y peut rien; il appartient à l’agriculture elle-même de corriger ses mauvaises tendances, et elle l’travaille; le rôle du capital est de jour en jour mieux compris, surtout dans les parties de la France les plus riches et les plus éclairées.

Restent les causes artificielles qui éloignent les capitaux du sol.