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Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 78.djvu/497

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sonne, que « de tous côtés » il n’a que des rapports satisfaisans avec les autres puissances. — Nous, en France, nous n’allons pas si vite, nous laissons un peu plus de repos à notre corps législatif, qui a déjà fourni cette année une laborieuse carrière, et qui ne sera probablement réuni qu’au commencement de janvier pour sa dernière campagne avant les élections. Nous n’entrons pas moins comme les autres dans une période d’activité politique renaissante.

De tout ce mouvement des premiers jours d’hiver, il ne se dégage pas encore des signes bien distincts. Le discours de notre voisin le roi de Prusse peut bien passer pour être un peu circonspect et un peu froid, quoiqu’il se termine par le mot de paix, et les récentes paroles de M. de Beust, malgré tous les efforts du chancelier d’Autriche, ne sont pas sans avoir laissé quelques traces. Quoi qu’il en soit cependant, un bon air pacifique souffle de nouveau depuis quelques jours. Cette terrible « campagne d’hiver » dont on a tant parlé lorsqu’on la voyait en perspective s’est évanouie par degrés à mesure qu’on approchait du moment où elle aurait pu commencer. Pour l’instant, il est de toute évidence que la trêve est signée, acceptée, et qui sait si cette trêve, en se prolongeant, ne finira point par devenir tout simplement une paix durable, en laissant à l’opinion et aux intérêts le temps de peser sur les résolutions suprêmes, de retenir des gouvernemens qui ne demandent peut-être pas mieux au fond que d’être retenus. Nous sommes donc à la paix, à la paix d’hiver au lieu d’être à la campagne d’hiver. D’ailleurs M. Disraeli vient de nous le dire dans le dîner du lord-maire, à Mansion-House, et il nous promet au besoin l’appui de sa politique médiatrice, pour peu que les élections le laissent vivre. Nous voilà complètement rassurés ; chacun peut revenir à ses affaires, la Prusse à l’assimilation de ses provinces annexées, l’Autriche à son organisation toujours branlante de quelque côté, l’Italie à la réforme de son administration, au moins aussi malade que ses finances, la France à ce pénible travail intérieur qui la met en guerre avec elle-même, quand elle n’est pas en guerre avec les autres.

Ce travail, à vrai dire, devient de plus en plus obscur, et de plus en plus ressemble à une énigme. Avançons-nous, reculons-nous sur le chemin qui conduit à ce que M. Thiers appelait si bien un jour les « libertés nécessaires ? » La question est étrange, et cependant elle s’élève à chaque pas, tant notre vie intérieure, assez laborieuse déjà, s’embarrasse de complications imprévues, de conflits soudains, tant nous paraissons novices quelquefois dans la pratique de cette liberté que nous revendiquons justement, tant enfin nous nous laissons aller à nous faire une sorte de point d’honneur de jouer avec toutes les difficultés. Assurément, s’il y a un incident bizarre et douloureux, c’est celui qui vient de surgir au moment où on y pensait le moins. Il faut dire simplement le fait. — Il y a dix-sept ans, le 3 décembre 1851, un représentant du