Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 79.djvu/276

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

volonté; « éternellement mobile, elle symbolise la vie relativement à la terre impassible et silencieuse qu’elle assiège de ses flots. »

La seconde partie du nouveau volume de M. Reclus est consacrée à la météorologie et à l’étude du magnétisme terrestre. On y trouve exposés avec une grande clarté et avec des détails fort curieux la théorie des vents et des tempêtes, le régime des pluies, la distribution des orages, les phénomènes encore si mystérieux des aurores polaires. L’étude des orages, dont on ne saurait méconnaître la portée pratique, a pris dans ces derniers temps un élan tout nouveau grâce à l’initiative de l’observatoire de Paris. Les cartes météorologiques de la France, dressées depuis 1865 à l’aide des documens recueillis par de nombreux observateurs, montrent avec évidence que les orages de l’Europe occidentale suivent la même direction générale que les tempêtes et en accompagnent souvent la marche. Les orages ne doivent donc plus être considérés comme des phénomènes purement locaux; ce sont des symptômes d’un mouvement général de l’atmosphère. Il paraît acquis aujourd’hui que presque tous les orages nous viennent de l’Océan; très souvent les riverains entendent gronder le tonnerre dans les nuages marins plusieurs heures avant que le météore éclate sur la terre; de même en Allemagne les nuées orageuses viennent de l’ouest et du sud-ouest. Ce n’est que par exception que les nuages formés par l’évaporation des eaux dans l’intérieur des continens donnent naissance à des orages; mais la configuration du sol exerce une grande influence sur ces météores en modifiant la marche et les allures de ceux qui sont envoyés par la mer. Les orages secondaires qui se détachent du courant principal se propagent de préférence le long des montagnes, des collines ou des forêts. On les voit suivre les vallées comme des fleuves aériens superposés aux fleuves liquides qui roulent au-dessous; ils semblent être entraînés par l’eau, tandis qu’au contraire ils évitent les forêts et les contournent au besoin. La nature géologique du sol n’est pas non plus sans influence sur la marche de ces redoutables météores; il semble qu’il y ait des roches qui les attirent et d’autres qui les dissipent. Vers les pôles, le nombre des orages diminue considérablement, et l’on sait que dans le haut nord ils sont un phénomène très rare; mais il n’est pas exact de dire qu’en Islande et sur les côtes du Spitzberg on n’ait jamais vu d’éclair. Il y a eu en Islande des incendies causés par la foudre et des hommes foudroyés. D’après Cranz, on voit des éclairs au Groenland ; de Baer et d’autres naturalistes ont observé des orages à la Nouvelle-Zemble et à Mageroé; enfin les quatre Russes qui passèrent six ans sur une île à l’est du Spitzberg y ont entendu gronder le tonnerre.

La partie de l’ouvrage de M. Reclus qui paraîtra à beaucoup de lecteurs la plus intéressante est la dernière; elle a pour titre : la Vie. Cette partie est consacrée à l’étude de la flore et de la faune terrestres, aux races humaines considérées dans leurs rapports avec le sol, et à la réac-