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en cuivre d’une capacité double du poids de la résine, et placez-la sur le feu pour la faire cuire. Ayez soin d’empêcher qu’elle ne déborde. Si vous la voyez monter, retirez-la du feu et soufflez dessus avec un chalumeau, ou placez la chaudière dans un autre vase rempli d’eau froide, ce qui arrête sur-le-champ le débordement. Remettez-la ensuite sur le feu, et recommencez ainsi à plusieurs reprises jusqu’à ce que la résine cesse de déborder. C’est ainsi que se prépare la pegola, dont vous mêlez trois parties avec une de péséri (huile siccative) pour faire un vernis excellent. Si vous avez de bon mastic, vous pouvez, au lieu de trois parties de pegola, n’en mettre que deux et une de mastic.

« En troisième et dernier lieu, vous me demandez ce qui est advenu de notre jeune compagnon d’atelier, Pasquale Ziobà. Vous l’aviez laissé, dites-vous, aux prises avec un péril pressant. Tranquillisez-vous, mon cher disciple, sur le sort de cet aventureux personnage, auquel j’en veux quelque peu de nous avoir si bien trompés, vous et moi. Il est de ceux qui ne se laissent pendre qu’à fort bon escient et le plus tard qu’ils peuvent. En présence d’un meurtre bien et dûment constaté, le conseil des dix n’a pu tout d’abord le renvoyer absous, et pourtant on ne voulait point condamner (pour raison d’état) ce rejeton des Gambara. On s’en est tiré en ajournant indéfiniment la sentence, qui n’est pas encore rendue, et ne le sera probablement jamais, à moins d’un complet revirement dans nos affaires politiques, revirement d’ailleurs très possible, En attendant, les trois inquisiteurs ont autorisé la mise en liberté du prisonnier, sous condition qu’il partirait immédiatement pour Milan, où vient de mourir le noble marquis de Pescara, Ferdinand-François, aussitôt remplacé dans le commandement des forces espagnoles par son neveu Alphonse d’Avalos, marquis de Vasto, qui tout justement me faisait demander ces jours-ci, sachant en quels termes j’ai vécu avec Pasquale, quelques renseignemens sur l’héritier des Gambara, lequel paraît en fort bon poste auprès de ce très haut et puissant seigneur. On dit ici tout bas qu’il se négocie entre le pape, le duc de Milan et les deux républiques (Florence et Venise) une nouvelle ligue contre l’empire. On ajoute que notre ancien compagnon d’atelier a dû porter au marquis de Vasto les propositions des futurs alliés, qui espèrent gagner à leurs intérêts par de brillantes promesses le nouveau représentant de la puissance espagnole. On offrit bien à son oncle dans le temps, et pour les mêmes fins, la couronne napolitaine. Si Pasquale Gambara venait à réussir, attendez-vous à lui voir fournir une brillante carrière, dont le premier pas, je pense, sera la restitution des domaines paternels. S’il échoue, il sera désavoué d’abord, et ensuite étranglé ou poignardé secrètement comme