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Mme DE ROCHEFORT
SA FAMILLE ET SES AMIS

I.
LA COMEDIE DE SOCIETE AU DIX-HUITIEME SIECLE.

Dans une lettre souvent citée, écrite en 1766 à son ami le poète Gray, Horace Walpole passe en revue les femmes les plus considérables de la société parisienne, fit après avoir parlé successivement de Mmes Geoffrin, du Deffand, de Mirepoix, de Boufflers, arrivant à Mme de Rochefort, il nous la présente ainsi : « Mme de Rochefort diffère de tout le reste. Son jugement est juste et délicat, avec une finesse d’esprit qui est le résultat de la réflexion ; ses manières sont douces et féminines, et, quoique savante, elle n’affiche aucune prétention. Elle est l’amie décente (decent friend) de M. de Nivernois, car vous ne devez pas croire un mot de ce qu’on lit dans leurs nouvelles ; il faut ici la plus grande curiosité ou la plus grande habitude pour découvrir la plus légère liaison entre les personnes de sexe différent, aucune familiarité n’est permise que sous le voile de l’amitié, et le dictionnaire de l’amour est aussi prohibé que semblerait l’être à première vue son rituel. » Walpole soulève ici une question délicate, sur laquelle on reviendra plus loin ; contentons-nous pour le moment de faire remarquer qu’à l’époque où il écrivait ces réflexions à propos de Mme de Rochefort, celle-ci était âgée de cinquante ans, et que le duc de Nivernois avait exactement le même âge.