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à se détruire lorsque la truffe atteint la grosseur d’une noix ; bientôt elle disparaît entièrement, et la truffe se trouve dès lors isolée et se développe à nu. Elle produit à son tour des spores donnant naissance à un mycélium filamenteux, origine de nouvelles truffes. Ainsi s’est trouvée complétée l’assimilation entre la truffe et les autres champignons hypogées, issus d’un mycélium et se reproduisant au moyen de séminules. Si le mycélium des truffes s’était jusqu’ici dérobé à toutes les recherches, c’est que ces filamens très ténus, dont le diamètre n’excède point 15 millièmes de millimètre, disparaissent entièrement longtemps avant la maturité du tubercule.

Il semble que, du moment que l’on connaît la nature de la truffe et que l’on est en possession de séminules reproductrices, il devrait être facile de se livrer à la culture de ce champignon, comme on l’a fait pour ce champignon de couche. Rien n’est moins vrai. On a eu beau placer les sporules sur des substances humides ou dissoutes contenant les principes nécessaires pour les nourrir, on n’a pas vu dans la plupart des cas apparaître de mycélium. Cependant on est parvenu quelquefois à en déterminer la production et à obtenir des truffières fertiles en cherchant à se rapprocher autant que possible des conditions où s’étaient développées les truffières naturelles. Ces conditions sont encore assez mal définies. Les gens qui se consacrent à la recherche des truffes dans les régions où elles viennent spontanément sont guidés par des indices assez vagues, et que l’instinct et l’habitude leur fournissent plutôt que le raisonnement. Il est positif que le degré de sécheresse ou d’humidité, la présence de certaines essences forestières, ont une grande influence sur l’abondance des truffes. Ainsi l’on n’en rencontre sous aucune plante monocotylédone, ni sous aucun végétal herbacé. Elles aiment les terrains pierreux, ferrugineux, et semblent se plaire sous sept espèces de chênes, principalement, d’après M. Chatin, sous le Quercus pubescens. Le chêne vert est très favorable aux truffières en Provence, le Quercus coccifera peut donner lieu dès l’âge de quatre ans à la production de truffes ; mais ces remarques ne fournissent que des probabilités, et l’on se tromperait beaucoup en voulant tirer des règles générales des coïncidences qui se présentent dans ces recherches.

Les premiers qui aient obtenu des résultats satisfaisans dans l’établissement de truffières artificielles sont des paysans provençaux établis sur les pentes du mont Ventoux. Ils tenaient secrets les procédés qu’ils mettaient en usage ; mais un marchand de truffes, parcourant le pays pour son commerce, parvint à les surprendre, et les appliqua d’abord à quelques hectares d’un terrain convenable, puis à une exploitation plus étendue. Cette tentative, qui avait