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de plusieurs papes du IIIe siècle. Aucun doute n’était plus possible; on se trouvait dans la crypte papale. Cette découverte fit grand bruit, et méritait d’en faire; c’était la confirmation la plus éclatante des idées de M. de Rossi et de sa méthode. Dans les planches qu’il a jointes à son ouvrage, il nous montre l’état actuel de la crypte et l’aspect qu’elle devait probablement présenter au IIIe siècle. On y a découvert l’emplacement d’un autel où l’église célébrait ses mystères auprès du tombeau des saints et des martyrs. Un fragment d’inscription du pape Damase indique la place de la chaire épiscopale dans laquelle Sixte II était assis quand il fut tué par les soldats de Valérien. Le long des murailles, dans ces niches aujourd’hui ouvertes et vides, les papes étaient ensevelis. Ces plaques de marbre dont les débris couvrent le sol fermaient la niche et portaient l’épitaphe. On a retrouvé cinq de ces inscriptions ; elles sont remarquables de simplicité, et ne contiennent ni éloges ni regrets. On y lit seulement ces mots : Antéros, évêque ; Eutychiànus, évêque. Sur celle de Fabien, une autre main a ajouté plus tard le mot de martyr[1]. Ce sont pourtant ces hommes qui ont fondé la grandeur de l’église. Leur souvenir a péri, leur œuvre est restée. On sait peu de choses aujourd’hui de leur vie et de leurs actes; mais on peut affirmer que, vivant à une époque où les affaires chrétiennes s’étaient fort compliquées, où il leur fallait non-seulement diriger des âmes, comme leurs prédécesseurs, mais administrer des biens, organiser la hiérarchie, traiter avec le pouvoir civil, ils ont alors fait l’essai de ces qualités de gouvernement qui, après Constantin, leur ont été si utiles. On comprend l’importance que M. de Rossi attache à compléter leur histoire et à y ajouter des détails nouveaux; on comprend surtout la joie qu’il a ressentie en retrouvant la crypte où ils reposaient. C’est assurément la découverte la plus importante qu’on ait encore faite aux catacombes.


II.

Les tombes des papes et des martyrs célèbres que contient le cimetière de Calliste ont d’abord attiré l’attention de M. de Rossi; mais elles n’y sont pas seules. Tout un peuple de morts inconnus remplit les chambres et les galeries. Les pauvres gens y sont naturellement les plus nombreux; on les reconnaît vite à la détestable orthographe de leurs inscriptions funèbres. Les riches se distinguent au contraire par une épitaphe mieux écrite et une sépulture

  1. M. de Rossi croit pouvoir conclure de cet exemple que le titre de martyr n’était accordé qu’après une délibération de l’église.