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même ce débouché n’est entièrement ouvert qu’aux huiles lourdes pour le graissage des machines, car les huiles légères pour l’éclairage rencontrent à l’ouest la concurrence des masses de pétrole raffiné qui descendent de Pittsburg par la rivière. La Kanawha prend sa source sur les hauteurs de Laurel-Hill, — la colline du Laurier, — l’une des dernières rides occidentales du massif des Apalaches, et vient se jeter à Parkersburg, dans l’Ohio. Parkersburg joue ainsi le rôle d’Oil-City ; c’est le point où s’opèrent la réception et le départ des huiles recueillies dans la vallée. Il y avait là, au mois de décembre 1866, une ville de 8,000 âmes environ, qui grandissait à vue d’œil, ressemblant d’ailleurs à toutes les villes d’huile du Canada et de la Pensylvanie : même désordre apparent, même existence fiévreuse. Ajoutons que cette localité n’a pas été fondée par l’industrie du pétrole ; c’est ce qui lui promet un avenir qui ne peut être réservé aux différens centres disséminés le long d’Oil-Creek. Les affluens de la Petite-Kanawha serpentent parmi des forêts pleines d’excellens bois pour la marine, sur un sol fertile qui recouvre de riches mines de houille. Les bois ont fait de Parkersburg un important chantier de construction de bateaux à vapeur ; le charbon y a favorisé l’établissement de plusieurs manufactures, en même temps que l’élève du bétail et les salines de la contrée ont permis d’y installer des ateliers de salaison de viandes, comme à Cincinnati et Chicago. Les hommes d’huile virginiens, plus favorisés en cela que ceux de la Pensylvanie, ont trouvé là un centre habité déjà prospère, tandis que les pionniers d’Oil-Creek ont dû s’établir en plein désert ; mais tandis que le comté de Venango, éloigné du théâtre de la guerre, offrait aux travailleurs une sécurité complète, la vallée de la Petite-Kanawha se trouva infestée de guérillas au moment où les découvertes de nappes de pétrole abondantes venaient multiplier les exploitations dans cette vallée. Les maraudeurs, furieux de ne point trouver à vivre dans ce pays resté loyal, prirent plaisir à incendier tous les puits à pétrole qui avaient été abandonnés par leurs propriétaires. Or presque tous les propriétaires avaient pris la fuite. Le petit nombre de ceux qui restèrent se défendirent avec courage, et en furent largement récompensés, car ils purent acquérir à vil prix, quelquefois pour rien, des territoires fort riches en huile. Du reste, à titre de représailles, le gouvernement fédéral fit saisir et vendre aux enchères les propriétés que les principaux rebelles possédaient dans le pays, afin de dédommager ceux qui avaient le plus souffert des incursions des partisans.

Pendant ces dernières années, on a émis beaucoup d’hypothèses touchant l’origine du pétrole. Le plus grand nombre des savans américains professe que cette origine est organique. La décomposition des plantes marines ou des animaux gélatineux qui ont vécu