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III. — DÉSIR D’AVRIL.


En plein bois, dans la profondeur
Où tremblent des lumières vertes,
Les muguets à l’exquise odeur
Balancent leurs grappes ouvertes.

Les muguets blancs m’ont enivré,
Et la voix du ramier qui chante
Au fond de mon cœur enfiévré
A mis un désir qui fermente.

La douce pâleur des muguets
Et leur haleine parfumée
Ont évoqué dans les forêts
Ton cher fantôme, ô bien-aimée !

Tes bras ont leur blanche couleur,
Tes yeux sont verts comme leur tige,
Et, comme leur exquise odeur,
Tes baisers donnent le vertige.

Parmi les bois mélodieux
Qu’avril embaume et renouvelle,
Oh ! de ta lèvre et de tes yeux
Goûter la caresse éternelle !…

IV. — JOIE DE VIVRE.


Le soleil de juillet s’élance à l’horizon,
Les martinets légers qui tournent dans la nue
Font retentir le ciel de leur claire chanson.

Une ombre fraîche et bleue emplit encor la rue,
Mais des pavés du seuil aux poutres du pignon,
Partout avec le jour la vie est revenue.

L’enfant s’éveille et rit dans son berceau mignon,
Des fruits roulent vermeils dans l’étroite embrasure
D’une échoppe, et là-haut, en nouant son chignon,

Près de sa vitre où tombe un rideau de verdure,
Une fille aux bras nus répète à pleine voix
Les refrains familiers qu’un vieil orgue murmure.

Fuyons la ville ! Viens, loin des murs et des toits,
Aux champs où la rivière épand sa nappe blanche ;
Viens dans les prés en fleur, en plein air, en plein bois !