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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 82.djvu/1025

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eaux saumâtres des vastes lagunes qui communiquaient avec eux et dans de grands lacs d’eau douce séparés entièrement de la mer. Les couches inférieures, par conséquent les plus anciennes, ne contiennent pas de vestiges d’êtres organisés, végétaux ou animaux. Le règne organique n’existait pas encore à l’époque où elles se formèrent, ou du moins les êtres qu’il comprenait ont péri sans laisser de traces visibles après eux. Les géologues désignent ces couches sous le nom de couches azoïques. Dans les terrains appelés siluriens, qui succèdent immédiatement à ceux-ci, les premiers fossiles se montrent sous la forme de polypiers, de coquilles et de carapaces de crustacés (trilobites), dont les parties dures se sont conservées. Des plantes devaient servir de nourriture et de refuge à ces animaux marins ; mais les tissus de ces plantes étaient trop mous pour qu’elles pussent, comme les animaux, échapper à la destruction. Dans les couches immédiatement supérieures, le vieux grès rouge ou terrain dévonien inférieur, le règne animal continue son évolution : de nouveaux polypiers, de nouveaux mollusques, de nouveaux crustacés, apparaissent, et avec eux les premiers poissons, formes embryonnaires des poissons qui peuplent maintenant nos mers, nos lacs et nos rivières. Le règne végétal nous fait toujours défaut, ou n’est représenté que par quelques débris de plantes marines appartenant à la grande classe des algues, mais à des groupes secondaires qui n’existent plus aujourd’hui. Les premiers végétaux terrestres se montrent dans le terrain dévonien supérieur. Ce sont les cryptogames vasculaires, c’est-à-dire des végétaux analogues aux prêles, aux fougères et aux lycopodes. D’abord rares et peu varies, ils se multiplient comme nombre et comme espèces pour constituer la formation houillère, dont les couches exploitées sont composées entièrement de leurs débris. La houille, âme de l’industrie moderne, est donc le produit du premier épanouissement de la végétation à la surface du globe. Des arbres gigantesques appartenant à des genres disparus ou représentés aujourd’hui par d’humbles herbes couvraient de vastes espaces du sol à peine émergé ; ils peuplaient des forêts marécageuses où les troncs, tombant de vétusté, s’entassant pendant des millions d’années, se sont convertis en houille, comme certaines mousses se transforment sous nos yeux en tourbe combustible. Dans la vase de ces forêts apparurent les premiers reptiles, ébauches grossières des animaux terrestres. Aux formes, inconnues dans la flore aujourd’hui vivante, des stigmariées, sigillariées, annulariées, sphénophyllées, se mêlaient des arbres plus élevés dans la hiérarchie végétale, des conifères et des cycadées, dont les pins, les sapins, les araucaria, les ginckos, les cycas et les zamia sont les représentans vivans. Toutefois, par le port, par les caractères, ces arbres fossiles se rapprochaient des fougères et des lycopodes arborescens qui formaient le fonds commun de la végétation houillère.