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diminution des dépenses, et les économies purement administratives suffiraient-elles à rétablir la situation respective des deux budgets telle qu’elle s’était présentée deux ans auparavant ? C’est alors que deux moyens de parer au mal furent soumis à l’appréciation du pays. La solution proposée devait produire à la fois une augmentation des recettes par l’assujettissement des titres de la dette à l’impôt sur le revenu et une diminution des dépenses par le remboursement en papier des obligations fédérales connues sous le nom de 5-20[1].

Les 5-20 sont les seuls titres pour le paiement desquels la loi ne se soit pas expliquée d’une manière catégorique. Elle a spécifié que les 10-40 seraient remboursés en monnaie métallique. Elle a indiqué le paiement en papier pour les anciens 7-30 et le petit nombre de certificats encore en circulation. Quant aux 5-20, l’acte du 25 février 1862, qui a autorisé la première émission de ces titres, ne dit pas explicitement s’ils seront payés en or ou en billets ; il porte simplement qu’ils seront « rachetables cinq ans et remboursables vingt ans après l’émission, de plus échangeables contre des billets de la trésorerie. » Cependant rémission de la première série de 5-20 était antérieure à l’établissement du cours forcé des billets. Ceux-ci avaient donc à ce moment la valeur de l’or, et le législateur ne se trouvait point dans la nécessité de stipuler expressément le remboursement en monnaie métallique. On ne saurait donc inférer du silence de la loi que le paiement en or des 5-20 fût facultatif.

L’assimilation des titres de la dette aux autres Valeurs soumises à l’impôt sur le revenu ne s’appuyait pas sur des motifs beaucoup plus valables. Comment ! disaient ceux qui la proposaient, les agriculteurs, les industriels, les commerçans, dont la fortune est toujours plus ou moins aléatoire, sont contraints de remettre à l’état une part de leurs profits annuels, et les capitalistes, dont le revenu, placé en titres de la rente, se trouve à l’abri des risques et des incertitudes commerciales, auraient l’avantage d’être dispensés de contribuer aux charges publiques ! Le raisonnement peut être spécieux ; il fut loin de convaincre le congrès, qui n’accorda pas même à ces théories l’honneur d’une discussion sérieuse. C’est aux États-Unis du reste qu’une semblable doctrine avait le moins de chances de faire fortune. Les titres de la dette fédérale ne sont point, comme les consolidés anglais ou la rente française, un placement dans lequel les porteurs de titres n’ont en vue que le paiement à perpétuité d’annuités fixes en échange desquelles ils abandonnent tout droit.au remboursement du capital. Aux États-Unis, le gouvernement s’engage à rembourser la valeur des obligations souscrites dans un délai

  1. Nous rappellerons que les noms adoptés pour désigner ces titres indiquent le nombre d’années au bout desquelles ils avaient été déclarés remboursables lors de l’émission : ainsi les 5-20 (five-twenties) sont des obligations remboursables en cinq ans au moins, vingt ans au plus. Les 7-30 tirent leur nom du taux d’intérêt auquel ils furent émis. Voyez la Revue du 15 septembre 1868.