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normal suffisent au service; elles ont, pendant l’année 1868, abrité les détenus qui étaient attendus à la cour d’assises, ou avaient interjeté appel à la suite d’une condamnation correctionnelle. La partie de la prison réservée aux besoins de la cour impériale se nomme la Conciergerie neuve, parce qu’elle a été reconstruite en partie et aménagée selon le nouveau système pénitentiaire. La vieille Conciergerie a des souvenirs qui ont leur importance dans l’histoire : là est le cachot où fut enfermée Marie-Antoinette, celui qui vit passer Danton, le caveau où Robespierre blessé fut déposé, la salle où les accusés attendaient l’heure de monter au tribunal révolutionnaire; cette dernière salle sert de chapelle aux prévenus; le cachot de Marie-Antoinette est orné de peintures et d’inscriptions commémoratives. Les bâtimens qui l’avoisinent sont destinés à disparaître bientôt pour faire place à des constructions plus amples et mieux appropriées; mais la cellule où fut enfermée la reine de France sera religieusement conservée. C’est là une erreur; à quoi bon perpétuer de telles reliques, à quoi bon rappeler toujours à une nation les fautes qu’on lui reproche, et ne pas rejeter au néant ces souvenirs lugubres, inutiles témoignages de haines aujourd’hui oubliées?

Un autre corps de logis passablement lézardé et sentant le vieux est appelé le quartier des cochers. Il est destiné à recevoir les personnes qui, par jugement du tribunal de simple police, ont un ou deux jours de prison à faire : comme les cochers sont plus que personne exposés à ces condamnations insignifiantes, ils ont donné leur nom au préau et aux bâtimens où ils viennent purger leur peine. C’est là aussi que se trouve l’infirmerie, chambre carrée chauffée par un poêle de faïence, et qui ne mériterait guère qu’on en parlât, si, du 12 août au 26 septembre 1840, elle n’avait eu pour hôte le prince Louis-Napoléon, pendant que la cour des pairs instruisait le procès de Boulogne. Le mouvement des prisonniers à la Conciergerie est assez considérable, car en 1868 il a été de 5,289 entrées et de 5,287 sorties. Au 31 décembre, la prison renfermait 91 détenus. Si quelques condamnés obtiennent de faire leur temps dans la maison de justice, c’est par faveur exceptionnelle et seulement dans le cas où ils ne sont frappés que d’une peine légère. Le service des détenus entre la prison et le Palais de Justice est confié aux gardes de Paris et à la gendarmerie de la Seine. La surveillance est assez bien faite pour qu’on n’ait relevé aucune évasion depuis plusieurs années.

C’est dans la Conciergerie que la justice garde les accusés, c’est dans le dépôt et les archives des greffes qu’elle conserve les objets saisis et les pièces des procès. Le tribunal de première instance et la cour impériale ont des greffes séparés, mais dont l’aspect est