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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 82.djvu/983

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d’eux ne profita en fait de cette soi-disant amnistie, et le sort de quelques-uns d’entre eux fut au contraire considérablement empiré. Les portes des prisons d’état s’ouvrirent pour un très petit nombre d’ecclésiastiques. L’évêque de Gregorio, le père Fontana, l’abbé d’Astros, l’abbé Hamon, l’abbé Duvivier, continuèrent à être traités avec la même rigueur; Fenestrelle, Pignerol, Campiano et la Corse recelèrent, comme par le passé, ceux dont le zèle pour la cause du saint-siège avait déplu à l’empereur. Toutes les mesures que nous venons d’énumérer étaient datées des premiers jours d’avril 1813, et le 15 de ce même mois Napoléon, ayant ainsi pourvu à sa manière à l’expédition des affaires religieuses de l’empire, partait pour Mayence afin d’y aller prendre le commandement de son armée d’Allemagne.


II.

« Lorsque l’empereur est absent, son ministre se tait, c’est la règle, » écrivait l’archevêque de Tours en 1811. Depuis lors, les choses n’étaient point changées. Napoléon, qui ne devait plus revoir Pie VII, allait seulement faire cette fois une plus longue absence. Absorbé pendant le reste de l’année 1813 par les opérations militaires de la campagne d’Allemagne et dans les premiers mois de 1814 par la défense du territoire national, il n’était plus destiné à donner aux affaires religieuses de son empire qu’une attention assez distraite. Quant à son ministre des cultes, s’il eût osé parler, nul doute qu’il n’eût adressé à son maître de sages remontrances, et qu’il ne lui eût recommandé avant tout beaucoup de modération et les plus grands ménagemens à l’égard du clergé. Malheureusement M. Bigot de Préameneu n’était pas libre d’agir suivant son propre mouvement, et les instructions qui lui avaient été laissées ne lui permettaient point de demeurer dans l’inaction. Elles étaient au contraire aussi précises qu’impératives, et le crédit dont il jouissait n’était plus tel qu’il pût prendre sur lui soit d’en ajourner l’exécution, soit d’en adoucir la rigueur. Parmi les fâcheuses mesures dont Napoléon avait en partant légué le soin à son ministre figurait l’obligation de faire à tout prix reconnaître et instituer les évêques récemment nommés aux sièges de Troyes, de Tournai et de Gand. C’était mettre de gaîté de cœur le feu à ces trois diocèses.

Il est de règle en effet dans l’église qu’un siège épiscopal n’est point vacant aussi longtemps que la démission du titulaire n’a pas été acceptée par le souverain pontife. Ainsi que nous l’avons précédemment expliqué, aucun désordre sérieux n’avait éclaté dans les anciens diocèses de MM. Hirn, de Boulogne et de Broglie, parce que les chapitres avaient trouvé moyen d’élire pour administrateurs pro-