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L'ALGERIE SOUS L'EMPIRE

LES INDIGENES ET LA COLONISATION

I. Bureaux arabes et Colons, par MM. Jules Duval et Auguste Warnier, Paris 1869. — II. La Politique impériale en Algérie, par M. Jules Duval, Paris 1866.

Celui qui arrive sans parti-pris sur la terre algérienne, et qui parcourt la zone comprise entre la mer et la chaîne de l’Atlas, ne peut se défendre de deux sentimens très opposés, l’un d’admiration pour la richesse du pays, l’autre d’étonnement à la vue du faible parti qu’on en a tiré. Quand le voyageur est Français, quand il sait combien la conquête de l’Algérie a été chèrement achetée, combien de braves soldats y ont trouvé la mort, combien d’intrépides colons y ont péri décimés par les fièvres, enfin combien de capitaux sont allés s’y engloutir, son étonnement devient de la tristesse. En même temps sa curiosité s’éveille : il veut savoir pourquoi tant de sacrifices sont demeurés à peu près stériles, et il est entraîné à étudier ce qu’on appelle la question algérienne.

D’ailleurs peut-il se dérober à l’intérêt que soulève cette question, en apparence si simple, en réalité si complexe ? A peine a-t-il pris place sur le paquebot qui fait le service d’Alger à Marseille, il est en pleine Algérie. Les passagers qui l’entourent l’entretiennent tous du pays qu’il va visiter. Le soir, quand la douceur d’une nuit étoilée appelle l’épanchement, le matin, quand les rayons encore obliques du soleil se reflètent sur les eaux bleues de la Méditerranée, il en entend conter les merveilles, décrier ou défendre l’administration. Déjà bien avant que le magnifique panorama d’Alger se déroule devant ses yeux, que la ville turque avec ses maisons blanches lui apparaisse de loin comme un long burnous qui baigne