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LA
PÊCHE DE LA BALEINE

La mer, qui occupe les trois quarts de la superficie du globe, n’est pas seulement la grande route du commerce, elle renferme une prodigieuse variété de produits qu’il serait facile d’approprier à nos besoins les plus urgens, Pourtant nous n’en avons pris jusqu’à présent qu’une bien faible partie. Habitués à tout demander à la terre, il nous semble qu’elle seule doit nous entretenir ; nous la remuons en tout sens, nous allons même jusqu’à la surmener pour lui faire rendre plus qu’elle ne peut, et nous négligeons avec une insouciance navrante ces richesses inouïes que les mers nous offrent. Comment se fait-il, par exemple, que la France abandonne la pêche de la baleine ? Cette industrie, où elle a obtenu de si beaux succès, semble mortellement frappée dans son avenir.

L’histoire des pêches ne nous donne rien de bien précis sur l’origine de la pêche de la baleine ; cependant tout porte à croire que les premiers hommes qui eurent l’audace d’attaquer dans son empire un adversaire de cette taille furent les habitans des régions boréales. Leur terre ingrate ne leur fournissant absolument rien, ils durent demander à la mer les choses indispensables à la vie, et la baleine devint nécessairement le but de tous leurs efforts. Ils trouvaient en effet dans le même animal un combustible pour se chauffer et s’éclairer pendant leurs longues nuits d’hiver, une chair grasse, très hygiénique dans les pays froids ; avec les intestins, ils se faisaient des vêtemens d’été, les tendons servaient à coudre leurs pirogues, et ils utilisaient jusqu’aux ossemens pour soutenir leurs