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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 83.djvu/931

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Sur le revers extérieur, du côté de la pleine mer, les trois îles offrent un coup d’œil tout différent. Elles s’inclinent en pentes douces et sont revêtues d’un manteau uniforme de tuf ponceux qui en certaines parties n’a pas moins de 30 et 40 mètres d’épaisseur. Des villages populeux apparaissent çà et là, et, tout autour des habitations, des vignes tressées en corbeilles revêtent le terrain d’une riche verdure. Il n’y a là pourtant d’autre terre végétale qu’une pierre ponce friable, dont les fragmens légers sont déplacés par le moindre vent, et transportés en tourbillons à de grandes distances par les ouragans des équinoxes.

À Santorin et à Therasia, les couches de tuf ponceux sont exploitées de temps immémorial pour la construction des maisons. La matière qui les constitue, délayée en proportions convenables avec de la chaux, forme un ciment doué de propriétés très remarquables : après dessiccation, il acquiert une telle dureté qu’on peut en faire de hautes maçonneries, des voûtes à grande portée qui résistent aux secousses de tremblemens de terre, si fréquens dans le pays. En même temps la grande résistance qu’il oppose aux agens atmosphériques et à l’action de l’eau de la mer a fait rechercher depuis quelques années ce ciment pour l’édification des môles et d’autres constructions maritimes dans toute l’étendue du bassin de la Méditerranée. Les travaux de l’isthme de Suez et ceux des ports de l’Égypte ont amené un redoublement d’activité dans l’extraction de cette matière ponceuse. Des déblais considérables ont été effectués ; ils ont découvert certaines parties du sol sous-jacent et mis au jour les débris de l’industrie humaine primitive.

L’exploitation du tuf ne s’est jamais opérée à Santorin que du côté interne de la baie et dans la partie méridionale de l’île. À Therasia, elle se fait sur une plus grande étendue relativement au développement des côtes, et a lieu non-seulement du côté de la baie, mais encore sur la falaise méridionale qui fait face à l’îlot d’Aspronisi. De ce côté, à peu près au milieu de l’espace compris entre les deux caps qui terminent l’île, il existe de vastes carrières à ciel ouvert, se faisant suite les unes aux autres et appartenant à plusieurs propriétaires. La matière qu’on y exploite est abattue sur le bord de la falaise et précipitée d’une hauteur d’environ 150 mètres au bas de l’escarpement. Des glissières habilement ménagées la dirigent dans sa chute et l’amènent au fond des bateaux qui l’attendent. Jusqu’à ce jour, on se contentait le plus souvent d’entailler les parties moyenne et supérieure de la couche ponceuse, qui étaient parfaitement homogènes, et l’on négligeait la partie la plus basse, qui paraissait mélangée de masses pierreuses. L’extraction s’arrêtait à un niveau inférieur dont la limite était marquée par de nombreux