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Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 84.djvu/391

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déjà l’on se préparait à transporter dans une ville de l’intérieur la riche bibliothèque d’Upsal. D’autre part, les Danois menaçaient, et on croyait les voir arriver en Scanie, pour reprendre cette province, une des plus fertiles de la péninsule Scandinave. Si l’on redoutait moins leur invasion par la Norvège, c’était par cette raison que les provinces suédoises de ce côté étaient devenues, pendant ces dernières années, et par l’effet de la misère générale, presque absolument incultes; les armées ennemies n’auraient pu s’y nourrir. Dans le complet désarroi du gouvernement et des esprits, la convocation des états-généraux était évidemment la seule ressource : au pays lui-même incombaient le droit et le devoir d’aviser à son propre salut au moment d’être précipité dans l’abîme. Ce fut dès lors l’opinion publique qui réclama de tous côtés et la convocation d’une diète et la constitution d’un pouvoir exécutif plus élevé et plus indépendant d’action que ne pouvait être le sénat.

La sœur du roi, Ulrique-Eléonore, fut ainsi associée, presque malgré elle, au pouvoir suprême. Il fut convenu qu’elle aurait deux voix dans le sénat; elle prendrait place à droite du trône; elle contresignerait toutes les résolutions publiques, comme les sénateurs eux-mêmes. Le 2 novembre 1713, au retentissement des salves d’artillerie, au milieu des espérances générales qui accueillaient ce changement comme si c’eût été le terme désiré de tant de souffrances, elle assista pour la première fois à la séance du sénat, et autorisa de son double vote la convocation de la diète pour le 14 décembre.

Le budget présenté à cette diète donnait pour chiffre des revenus 4,500, 000 thalers, tandis que le chiffre des dépenses s’élevait à 11,700,000 thalers. Dans cette dernière somme figurait l’entretien du roi Stanislas de Pologne aux frais de la Suède, 100,000 thalers, — celui des innombrables Suédois prisonniers en Russie, 150,000 thalers, — celui des prisonniers étrangers qu’il fallait nourrir en Suède, 50,000 thalers; puis venaient les bons à payer du roi à la suite de ses énormes dépenses en Turquie, non pas certes pour son propre entretien, qui était des plus simples, mais pour ce renom de générosité qu’il soutenait par des présens considérables. C’était aux malheureux Suédois de payer tout cela. — Le premier objet de la diète devait être de pourvoir sans trop d’oppression, s’il était possible, aux dettes et aux dépenses les plus criantes, ainsi qu’à l’état des armées; mais le pays ne pouvait pas supporter de nouvel impôt, et dans le triste état des affaires, quand le lendemain n’était pas même assuré, il n’y avait pas à compter sur des emprunts, ni à l’intérieur ni au dehors. On ne pouvait songer qu’aux expédiens. On proposa d’aliéner quelques portions du