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il peut l’être au-delà de l’Atlantique, d’ajouter 1/2 ou 3/4 pour 100 de plus aux frais actuels du monnayage.

Toutes ces objections sont graves. Malgré cela, nous ne croyons pas qu’il y ait lieu de se prononcer absolument contre les idées de M. Lowe et de dire que la plus-value de la monnaie ne pourra jamais compenser le droit de 1 pour 100 qu’il se propose d’établir. En définitive, quelque extension que puisse prendre l’usage du lingot, il ne remplacera jamais complètement la monnaie. Celle-ci répond à des besoins que le lingot ne satisfait pas, elle entre dans les relations quotidiennes et sert de base à toutes les transactions de détail ; on pourra l’économiser, mais on ne pourra pas la supprimer. On dit qu’elle sera beaucoup moins demandée, si on la soumet à un droit élevé. Cela est possible, mais il importe peu pour la théorie de M. Lowe que la monnaie soit abondante ou qu’elle ne le soit pas : il suffit qu’en vertu de l’utilité toute spéciale dont elle jouit, elle soit assez recherchée, et elle le sera certainement, pour qu’on consente à payer le droit ; si on y consent, c’est que la plus-value sera proportionnelle. Ce qui faisait autrefois que la monnaie falsifiée, abaissée dans son titre ou dans son poids, ne tardait pas à perdre de sa valeur, c’est que les souverains qui se livraient à ce genre d’opérations ne prenaient pas soin de limiter l’émission de la monnaie nouvelle. Comme ils y trouvaient un grand profit, ils l’augmentaient au contraire le plus qu’ils pouvaient, au moins dans la mesure du poids qu’ils avaient enlevé à l’ancienne. On peut supposer qu’aujourd’hui la pratique serait tout autre. L’état, avant de fabriquer la monnaie aux conditions nouvelles, attendrait qu’on vînt la lui demander, il ne la mettrait en circulation qu’autant que les besoins s’en feraient sentir, et alors l’équilibre s’établirait nécessairement entre le prix courant et le prix de revient. Et si on était tenté de croire que l’état ferait fabriquer outre mesure pour profiter de son droit et réaliser plus de bénéfices, ne pourrait-on pas dire qu’il serait arrêté lui-même par la valeur du lingot. Si la monnaie était trop abondante, le prix du lingot monterait : ce serait même la seule manière de montrer que la valeur de la monnaie ne reste pas au taux qu’il plaît au gouvernement de lui assigner ; alors l’état, obligé de payer la matière première plus cher qu’il ne faudrait pour la valeur légale de la monnaie, cesserait de fabriquer ; c’est ce qui arrive aujourd’hui. Pourquoi n’a-t-on pas fabriqué de pièces de 5 francs d’argent pendant près de quatorze ans, de 1853 à 1867 ? — Parce que ce métal valait plus en lingot qu’en monnaie. Si l’on recommence depuis deux années à en produire, c’est parce que la valeur commerciale du métal a baissé. Il y a un tarif d’après lequel l’établissement qui est chargé de nous