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REVUE. — CHRONIQUE.

exemple de cette navrante indifférence. Il lui manque toujours cent mille francs pour prendre la mer.

Les frais d’établissement de quelques observatoires de province ne seront pas si exorbitans qu’on le croit communément. Il serait absolument inutile d’organiser partout des observatoires complets, où seraient cultivées à la fois toutes les branches de l’astronomie. Les observations de précision, sur lesquelles repose le progrès de la théorie, pourraient être réservées à l’établissement principal, soit qu’on le laisse à Paris ou qu’on le transporte à Fontenay. La recherche des astres nouveaux est déjà organisée à Marseille et pourrait rester dans les attributions de cette station. Les grands télescopes de Marseille et de Toulouse se prêteront merveilleusement aux travaux qui sont du domaine de l’astronomie physique : étude de la constitution des comètes et des nébuleuses, du mouvement des taches solaires, des changemens qui s’opèrent à la surface de la lune. Viennent ensuite les expériences de photométrie, les applications de la photographie à l’étude des corps célestes, les recherches d’analyse spectrale, dont l’importance semble grandir chaque jour. Grâce à une application ingénieuse du spectroscope, deux astronomes étrangers, M. Huggins, en Angleterre, et M. Zoellner, en Allemagne, ont réussi à rendre visibles à toute heure du jour ces protubérances roses du soleil, qui jusqu’ici ne pouvaient s’observer que pendant l’instant fugitif d’une éclipse totale. On voit que ce prodigieux développement de la science astronomique offre aujourd’hui de quoi utiliser les tendances d’esprit les plus diverses, et qu’il justifierait amplement la division du travail. Encore n’avons-nous pas mentionné la nécessité d’un observatoire maritime, destiné spécialement à répondre aux besoins de la navigation; nous n’avons pas dit que Besançon réclame un observatoire dans l’intérêt de l’horlogerie française; nous n’avons pas encore parlé d’Alger, où les opérations géodésiques de l’état-major auraient besoin de trouver un point de repère sérieux.

Dans une note communiquée à l’Académie des Sciences, M Faye évalue à près de 300,000 francs les frais d’établissement de chaque observatoire de province, et à 20,000 francs les frais annuels (traitemens de trois astronomes, publications et entretien); mais, si l’on tient compte de la simplification considérable qui résulterait de la répartition des travaux de diverse nature, il nous semble que la dépense pour bâtimens et matériel peut être réduite à 100,000 francs, et l’allocation annuelle ne représente toujours que les deux tiers des appointemens d’un sénateur. Malgré l’exiguïté relative de ces sommes, M. Faye déclare « qu’il serait puéril de les demander au budget. » Il propose de vendre les terrains de l’observatoire de Paris, dont la valeur est estimée à près de 5 millions, d’attribuer à l’Observatoire impérial un million et demi pour sa translation en lui conservant son matériel et son budget actuels, et d’employer le reste à la fondation de cinq observatoires nouveaux. A