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LES MIGRATIONS VÉGÉTALES.

Languedoc. Des populations entières sont massacrées par Simon de Montfort. D’un autre côté, l’inquisition sévit en Espagne et provoque une émigration continue de Juifs et d’Arabes qui venaient chercher en France un refuge et un asile. L’élément sémitique se mêla donc alors aux races grecque, latine et germanique. Une dernière migration eut lieu à la fin du XVIIe siècle, — où la révocation de l’édit de Nantes porta un coup terrible à la prospérité des provinces méridionales en faisant disparaître par la misère, les massacres, les supplices et l’exil, la partie la plus saine, la plus intelligente et la plus industrieuse de la nation.

Ce que nous avons dit de la composition et de la formation successive des populations du midi de la France pourrait s’appliquer également à d’autres contrées de l’Europe. Il n’en est pas qui soit uniquement occupée par cette race autochthone dont l’origine se perd dans la nuit des temps géologiques; toutes ont été modifiées par des immigrations ou des émigrations successives. L’on compte les peuplades qui semblent avoir échappé à cette loi générale. Abordons maintenant la genèse des flores partielles de l’Europe, la seule partie du monde assez bien connue pour pouvoir être soumise à l’analyse scientifique. Nous y retrouverons des phénomènes de tout point analogues à ceux dont les migrations humaines nous donnent le spectacle.


I. — de l’origine primordiale des populations végétales.

M. Alphonse de Candolle a le premier établi, à la fin de sa Géographie botanique, que les végétaux actuels se rattachent intimement à ceux qui les ont précédés dans les différentes phases géologiques que la terre a traversées depuis son origine. Le premier il a fait voir par quels liens étroits tient la géographie botanique à la paléontologie végétale. Depuis quatorze ans que son ouvrage a été publié, les progrès de la science lui ont donné raison. Le nombre des plantes vivantes qu’on retrouve à l’état fossile augmente tous les jours. On commence à distinguer ces espèces primitives de celles qui, nées postérieurement, n’ont été observées jusqu’ici qu’à l’état vivant, et jamais à l’état fossile.

Tous les végétaux fossiles existant encore actuellement appartiennent aux terrains tertiaires ou quaternaires, c’est-à-dire aux couches sédimentaires les plus récentes du globe terrestre. Cela ne veut pas dire que ces végétaux n’aient aucune analogie avec ceux qui se retrouvent dans les formations plus anciennes, telles que les couches carbonifères, jurassiques ou crétacées; mais ces analogies sont éloignées, ce sont des rapports de classe, de famille, de genre;