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HOMMES D’ÉTAT
DE L’ANGLETERRE

JOHN BRIGHT.

Speeches on questions of public policy, by John Bright, edited by James E. Thorold Rogers ; 2 vol. in-8o ; London 1869.

« Nous tenons donc, Brutus, celui que nous cherchons, mais en esprit seulement ; car, s’il était à la portée de ma main, son éloquence même ne me persuaderait pas de le laisser aller. » Ces paroles, que Cicéron applique à l’orateur idéal, me revenaient à l’esprit en lisant le recueil de discours dont je viens de transcrire le titre. Sans doute M. Bright n’est pas l’orateur idéal, et nous ne manquons pas en France d’hommes bien disans que, pour ma part, j’admire fort. Cependant puisque nous entrons dans une ère où les foules gouvernent, ne serait-il pas heureux pour nous d’avoir, pour gouverner les foules, un orateur qui eût, comme M. Bright, l’autorité, la conviction et le bon sens ?

Ces discours, choisis avec beaucoup de goût par M. Thorold Rogers, forment seulement une faible partie de ceux que M. Bright a prononcés depuis trente ans. Comme œuvres d’art, ils sont presque tous de premier ordre, et il y aurait plaisir et profit à étudier les secrets de cette éloquence politique, essentiellement moderne par les procédés, qui ne ressemble ni à celle des anciens ni même à la notre. Par malheur dans ces discours, et c’en est à mon sens un des mérites, le fond est inséparable de la forme. Si les beautés y