à désirer. La descente est en pente douce, presque insensible, et le terrain est des meilleurs pour la construction d’un chemin de fer. On voyage avec rapidité, les temps d’arrêt sont réguliers ; enfin, bien qu’on soit encore éloigné des grands centres de l’Atlantique, on se sent au milieu de la civilisation, et l’on perd ce sentiment d’isolement dont on a peine à se défendre pendant la première partie du voyage.
A une trentaine de milles de Sherman se trouve Cheyenne. C’est, après Omaha, la ville la plus considérable de la ligne de l’Union. Elle compte 3 ou 4,000 habitans ; elle a un théâtre, une église, plusieurs hôtels, et elle fait un commerce assez lucratif avec Denver, avec la Cité des plaines et avec le Nouveau-Mexique. La première de ces deux villes sera prochainement reliée à Cheyenne par un embranchement ; la distance entre elles n’est que de 120 milles, et l’on dit qu’une compagnie anonyme a offert à l’Union de compléter la ligne entière pour 2 millions de dollars. Il se publie trois journaux à Cheyenne. A les lire, on croirait que cette petite ville n’est pas moins importante que Chicago ou San-Francisco. Sa position géographique ne lui permet pourtant pas d’avoir de grandes prétentions : située à mi-chemin entre Omaha et Ogden, sur la limite des prairies et des Montagnes-Rocheuses, elle est comme le point central d’une immense solitude qui ne pourra se peupler que fort lentement. Parmi les habitans de Cheyenne, on trouve un grand nombre de téméraires aventuriers qui n’attendent qu’une occasion pour aller au sud ou au nord, d’hommes qui n’ont peur de rien, qui sont bons à tout, de traqueurs qui parlent d’un combat avec les Indiens comme d’une partie de chasse, et qui sont à chaque instant prêts à s’embarquer dans les entreprises les plus hasardeuses, au demeurant des hommes extraordinaires qu’on ne peut s’empêcher d’admirer sous beaucoup de rapports, quoique leur commerce soit très désagréable sous d’autres, et dont l’existence entière n’est qu’une suite à peine interrompue d’étranges aventures. En quittant Cheyenne, on leur dit adieu. A Omaha déjà, quoique ce soit encore une ville dans l’enfance, tout est déjà mieux posé, plus établi.
Entre Wasatch et Cheyenne, sur un parcours de 600 milles, on a trouvé du charbon partout où l’on en a cherché, et cela à une assez faible distance du chemin de l’Union. Les principales mines sont situées près d’Echo, à Evanston, à Rocks-Springs, à Point of Rocks, à Black-Butts, à Rawlings-Springs, à Carbon et aux environs de Cheyenne. On a découvert aussi du fer et d’autres minéraux, et, malgré la cherté de la main d’œuvre (la journée d’un mineur se paie, suivant les localités, de 20 à 60, fr.), ces mines offrent d’incontestables avantages à la compagnie de l’Union.