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UN CONGRÈS INTERNATIONAL.

climat de la Laponie et où le Danemark était bien probablement inhabitable. La faune des kjœkkenmœddings eux-mêmes indique un temps sensiblement postérieur à celui où s’accumulaient les débris étudiés par M. Fraas, et l’archéologie doit évidemment tenir compte de cette considération. Les faits à la fois géologiques et paléontologiques observés par M. Dupont sont venus confirmer ces diverses conclusions. Dans les couches les plus inférieures, le savant explorateur des grottes de la Belgique a trouvé l’éléphant, le rhinocéros, le grand ours des cavernes, associés à des silex grossièrement taillés. Plus haut, dans une argile jaune spéciale, il a rencontré, à côté de représentans de la faune actuelle, des espèces qui ont depuis longtemps émigré vers le pôle, comme le renne et le glouton, ou qui se sont retirées sur nos plus hautes montagnes, comme la marmotte et le chamois. Là encore la pierre est seulement taillée en couteaux. En troisième lieu, et dans des couches également bien caractérisées, se présente la faune des tourbières Scandinaves avec des instrumens de pierre polie. En Belgique par conséquent, la zoologie et la géologie concourent à séparer nettement ces trois époques.

Le congrès a entendu un assez grand nombre d’autres communications relatives à la géologie considérée dans ses rapports avec l’archéologie. M. Vilanova en particulier a rappelé les faits déjà connus sur la composition des terrains de San-Isidro, près de Madrid. Là, dans les couches les plus inférieures du terrain quaternaire, au-dessous de celles qui contenaient des ossemens d’hippopotames, d’éléphans, de rhinocéros, on a trouvé des haches taillées semblables à celles de notre département de la Somme. L’homme se montrerait donc ici tout au moins comme contemporain de ces grands mammifères, dont on a cru si longtemps qu’il était séparé par des âges géologiques. Des tranchées de chemin de fer ouvertes dans la province de Cordoue ont présenté des faits entièrement pareils, M. Vilanova a exploré aussi un grand nombre de cavernes percées dans le calcaire crétacé du sud et du nord-est de l’Espagne, et constaté les habitudes troglodytiques des populations locales jusqu’à l’époque romaine. Du reste l’éminent professeur de Madrid va poursuivre ses recherches dans des conditions exceptionnellement favorables. Au milieu des préoccupations de toute nature qui l’assiègent, le gouvernement espagnol a compris l’intérêt de ses explorations et a mis à sa disposition cinquante ouvriers qui fouilleront sous ses ordres. Il est bien juste de signaler à la reconnaissance des hommes de science un pareil acte d’intelligente libéralité ; il est permis de souhaiter que cet exemple soit suivi ailleurs et chez nous-mêmes.