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LE DRAME DU VÉSUVE.

Malgré ces belles protestations, la direction des fouilles ne fut guère plus intelligente ni l’argent plus abondant tant que les Bourbons régnèrent à Naples. Cependant le goût de l’archéologie faisait des progrès dans le reste de l’Europe. Pour éviter les critiques des étrangers, on tenait à un secret rigoureux, on écartait les visiteurs ; les plus influens ne pénétraient que par force, les plus riches qu’en se soumettant à de singulières exactions. Le spectacle qu’ils avaient alors sous les yeux récompensait mal leurs efforts ; au milieu de tranchées mesquines et de ruines non entretenues erraient languissamment des condamnés enchaînés deux par deux et quelques esclaves mahométans pris aux Barbaresques. Il fallut une révolution et la présence des Français pour imprimer aux recherches une marche plus active. La France, partout où elle a porté ses armes, a porté aussi, comme excuse, l’amour des arts et de l’antiquité. Ses savans, les premiers, avaient tiré l’Égypte de son linceul ; ils devaient accompagner un jour nos armées en Grèce, en Afrique, en Syrie ; ils donnèrent alors aux Italiens eux-mêmes l’exemple du zèle et de la méthode. De même qu’à Rome les fouilles les plus considérables avaient été entreprises par les généraux ou les préfets français, de même la résurrection véritable de Pompéi date de l’occupation française[1]. Le général Championnet, lorsqu’il vint fonder la république parthénopéenne, songea aussitôt à Pompéi. Par son ordre furent déblayées les deux maisons auxquelles on a donné son nom. Après une réaction sanglante, les Français revinrent en 1806, et sous le règne de Joseph Napoléon, c’est-à-dire jusqu’au 23 mai 1808, plus de 150 ouvriers furent employés sans compter les enfans, qui couraient avec leurs petites corbeilles de jonc sur la tête. Murat porta ce nombre à 600, et allouait pour les fouilles plus de 100 000 francs par an. La reine Caroline suivait les travaux avec passion, elle encourageait tout le monde, se rendait chaque semaine sur les lieux. C’est alors que les monumens principaux, le forum, les murs d’enceinte, la voie des tombeaux, sont remis en honneur, et que Mazois, protégé par la reine, prépare son grand ouvrage qui n’a encore été dépassé par aucune des publications faites depuis soixante ans.

Lorsque Ferdinand Ier revint à Naples en 1815, il laissa aux chantiers une certaine activité tout en vendant une partie des terrains achetés par Murat ; mais à partir de 1819 cette activité se ralentit, et souvent, faute de fonds, les recherches furent suspendues. Sous les règnes de François Ier et de Ferdinand II, on avança lentement ;

  1. Voyez, sur ce sujet, le témoignage non suspect d’un Anglais, M. Dyer. (Pompéi, p. 50.)