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CÉSARINE DIETRICH

TROISIÈME PARTIE[1].

Le marquis se présenta aussi aisé, aussi courtois que si l’on se fût quitté la veille dans les meilleurs termes. M. Dietrich lui serra la main comme de coutume, se réservant de l’observer ; mais Gésarine, dont le sourcil s’était froncé, et qui était vraiment lasse de ses hommages, lui dit d’un ton glacé : — Je ne m’attendais pas à vous revoir, monsieur de Rivonnière.

— Je ne me croyais pas banni à perpétuité, répondit-il avec ce sourire dont l’ironie avait frappé Bertrand, et qui était comme incrusté sur son visage pâli et fatigué.

— Vous n’avez pas été banni du tout, reprit Césarine. Il se peut que je vous aie témoigné du mécontentement quand vous m’avez semblé manquer de savoir-vivre ; mais on pardonne beaucoup à un vieil ami, et je ne songeais pas à vous éloigner. Vous avez trouvé bon de disparaître. Ce n’est pas la première fois que vous boudez, mais ordinairement vous preniez la peine de motiver votre absenco. C’était conserver le droit de revenir. Cette fois vous avez négligé une formalité dont je ne dispense personne ; vous avez cessé de nous voir parce que cela vous plaisait ; vous revenez parce que cela vous plaît. Moi, ces façons-là me déplaisent. J’aime à savoir si les gens que je reçois me sont amis ou ennemis ; s’ils sont dans le dernier cas, je ne les admets qu’en me tenant sur mes gardes ; veuillez donc dire sur quel pied je dois être avec vous ; mettez-y du courage et de la franchise, mais ne comptez en aucun cas que je tolérerais le plus petit manque d’égards.

  1. Voyez la Revue du 15 août et du 1er septembre.