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mort. La France a le sens critique si développé et tant d’organes éminens de cette haute puissance, qu’il ne lui faudra pas beaucoup de temps pour s’éclairer sur la valeur des offres de salut qui lui sont faites de toutes parts. Cette discussion, à la condition d’être loyale et sérieuse, fera aisément justice du mandat impératif, qui n’est autre chose que la tyrannie de l’ignorance, si bien exploitée par le parti de l’empire. Faisons des vœux pour que la distinction du droit et de la fonction déléguée soit bien comprise et bien établie par nos écrivains, nos assemblées, nos publicistes de tout genre. Ils auront beaucoup à faire à ce moment de réveil général, qui va suivre, à la grande surprise des autres nations, l’espèce d’agonie où elles nous voient tombés. Il sera urgent de démontrer que le mandat impératif est une idée sauvage, et qu’il y aurait erreur funeste à en accepter l’outrage pour conquérir la popularité. Le droit du peuple à choisir ses représentans est absolu et doit être illimité. Le droit du représentant à consulter sa raison et sa conscience doit l’être également, ou bien la représentation n’est plus qu’une lutte aveugle, un conflit stupide entre les esclaves de tous les partis. Il serait temps de se défaire de ces erremens de l’empire. Nés fatalement dans son atmosphère, espérons qu’ils finiront avec lui.

Il y aura certainement aussi à éclairer l’assemblée constituante qui succédera prochainement à celle-ci sur un point essentiel, le droit de plébiscite. Il ne faut pas que ce droit, devenu monstrueux, établisse la volonté du peuple au-dessus de celle des assemblées élues par lui ; si le peuple est souverain, ce n’est pas un souverain absolu qu’il faille rendre indépendant de tout contrôle, priver de tout équilibre. Le plébiscite peut être la forme expéditive que prendra, dans un avenir éloigné, la volonté d’une nation arrivée à l’âge de maturité ; mais longtemps encore il sera un attentat à la liberté du peuple lui-même, puisqu’il est, par sa forme absolue et indiscutable, une sorte de démission qu’il peut donner de sa propre autorité. Je crois que, si ce droit n’est pas supprimé, il pourra être modifié par une loi qui en soumettra l’exercice aux décisions des assemblées. En temps normal et régulier, il ne faut jamais qu’un pouvoir exécutif puisse en appeler de l’assemblée au peuple et réciproquement. Je ne sais même pas s’il est des cas exceptionnels où cet appel ne serait point un crime contre la raison et la justice.

Mais ce ne sont pas là mes affaires, dit la fourmi, et je ne suis qu’une fourmi dans ce chaos de montagnes écroulées et de volcans qui surgissent ; je fais des rêves, des vœux, et j’attends.

Chers amis, que je vais enfin retrouver, aurez-vous tous été logiques avec vous-mêmes sous cette dictature compliquée d’une guerre atroce ? Quelles vont être vos élections de Paris ?

Je n’ai qu’un désir : c’est qu’elles soient l’expression de toutes