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leurs biens en perpétuelle emphytéose. Que tous les moines demeurant dans des lieux non conventuels soient rappelés à leur abbaye. Si l’abbaye n’a pas de prieuré conventuel suffisant pour changer de temps en temps l’habitation des moines qui, pour une cause ou pour une autre, se trouvent mal dans l’abbaye, on établira avec les biens de trois ou quatre prieurés un seul prieuré conventuel pourvu d’un maigre entretien, afin que les moines craignent d’y être envoyés. Ainsi tous les biens des monastères seront dans les mains d’un seul, qui alors ne craindra plus de faire observer la règle, tandis que les moines qui se sentent riches s’insurgent d’ordinaire contre leur abbé. D’après les statuts des saints pères, les clercs religieux et séculiers sont non pas les maîtres, mais simplement les administrateurs des biens ecclésiastiques. Ils ne doivent tirer de ces biens que le vivre et le vêtement ; le reste appartient aux pauvres. Le profit qui résultera de la suppression des prieurés n’appartiendra donc pas aux clercs ; il devra être appliqué à la grande œuvre de la chrétienté, à l’œuvre de la terre-sainte.

Que le pape remarque aussi combien de guerres longues et terribles ses prédécesseurs ont livrées pour la défense du patrimoine de saint Pierre, combien de catholiques ils ont excommuniés et voués à l’anathème pour avoir envahi ce patrimoine, quelles dépenses l’église a faites et aura peut-être à faire encore pour de pareilles guerres. Qu’il considère surtout la simonie régnant d’un bout à l’autre de l’église. Le souverain pontife a une telle charge spirituelle qu’il ne peut, sans préjudice des choses de l’âme, donner ses soins à l’administration des biens temporels. C’est pourquoi, après avoir examiné ce qui, déduction faite des charges et dépenses ordinaires, revient au saint-siège sur les revenus dont il jouit, il sera bon d’abandonner ces revenus en perpétuelle emphytéose à un roi ou à un prince considérable, ou même à plusieurs souverains, lesquels cautionneront la pension annuelle qui devra être payée au pontife, dans le lieu du patrimoine de saint Pierre qu’il choisira pour sa résidence. Ainsi le pape, qui doit être le promoteur de toute paix, ne sera plus cause de la mort affreuse qui enlève subitement tant d’hommes dans les combats. Il pourra se livrer à la prière, à l’aumône, à la contemplation, à la lecture, à l’enseignement des saintes Écritures ; il ne désirera plus amasser de trésors, et, n’étant plus arraché au soin des choses spirituelles, il mènera une vie à la fois contemplative et active.

Que le pape considère ensuite les sources scandaleuses des revenus des cardinaux, et fasse une constitution qui leur assure un entretien convenable sur le patrimoine de saint Pierre. Qu’à l’avenir, et sous les peines les plus sévères, le pape et les cardinaux ne reçoivent plus de présens. Que la moitié des biens des cardinaux et