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Japon (Cryptomeria japonica) dominent sur les collines. La province de Tché-kiang offre des ressources de tout genre ; on trouve en divers endroits l’arbre à vernis, une espèce de sumac dont on tire la substance qui donne aux meubles un brillant incomparable ; les laques de Canton sont faites de cette matière, dont la préparation réclame des soins attentifs à cause de ses propriétés vénéneuses. Au bord des étangs et des rivières croît un frêne sur lequel vit un insecte de la famille des cochenilles[1] produisant en abondance une cire blanche comme l’albâtre ; lorsque l’insecte est en plein développement, les arbres semblent couverts de plaques de neige. Un arbrisseau de la famille des légumineuses et du genre Cæsalpinia, qu’on rencontre dans différentes localités, a des cosses charnues dont on fait grand usage pour la table. Une plante du groupe des acanthes, cultivée en plusieurs endroits, fournit une belle teinture bleue[2].

Il est dans le nord du Tché-kiang, à 20 ou 25 lieues au sud-ouest de Ning-po, une localité célèbre qui s’appelle la Vallée neigeuse. Sur le trajet, on rencontre une belle montagne, où, parmi les arbres ordinaires au pays, de grandes masses de cyprès funèbres donnent au paysage un aspect tout nouveau. Le sol est riche en minerai de fer, qu’on exploite avec beaucoup d’activité. À quelques kilomètres plus loin, le voyageur côtoie un torrent, et dans toutes les directions il aperçoit des villages, puis, s’engageant dans un sentier qui s’élève entre des collines et des montagnes, il découvre bientôt la Vallée neigeuse. Au centre, on remarque un temple en ruines, au bord, une nappe d’eau tombant sur des roches aiguës qui donne des flots d’écume : c’est la neige de la vallée. Aux alentours, la plupart des collines sont boisées ; le pin de la Chine, le cèdre du Japon (Cryptomeria japonica), le sapin aux feuilles aiguës (Cunninghamia lanceolata), forment des forêts belles et pittoresques. De petits palmiers du genre des chamærops couvrent le sol en divers endroits, et des bambous, d’une espèce différente de celles des provinces méridionales, sont cultivés sur les pentes des montagnes. Aux environs de la ville Ning-kang-jou, au milieu d’une plaine, dans une situation plus élevée que la plaine de Ning-po, il y a des champs d’ortie blanche (Urtica nivea) dont les fibres servent dans une grande partie de la Chine à fabriquer des vêtemens. La plante croît naturellement sur les terrains escarpés, sur les murs des villes, sur les constructions en ruine ; mais à l’état sauvage elle n’a pas les qualités qui lui viennent par la culture. Il y a encore d’autres plantes textiles. La jute (Corchorus

  1. Coccus pela Westwood.
  2. Ruellia indigotica.