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résigné à la perte définitive de ces divers états, et dans la convention de 1286 entre lui et Philippe le Bel il n’est plus question que de la Guienne, au sujet de laquelle le roi d’Angleterre ne refusait pas le serment de fidélité. Des dissensions peu sérieuses s’élevèrent dans les années qui suivirent, principalement à l’occasion du refus d’hommage pour le comté de Ponthieu, passé par mariage en la possession de la maison d’Angleterre. Ces querelles finirent par la soumission des Anglais à la règle féodale et à la juridiction du parlement de Paris ; mais, au jour de l’avènement du père du roi Jean, de Philippe de Valois (1328), la lutte entre les deux maisons de France et d’Angleterre prit inopinément le caractère légal d’une contestation dynastique et d’une prétention à la couronne, prétention où le parti de l’étranger trouva des appuis, même parmi les princes du sang de France.

Charles le Bel, en mourant, ne laissa que des filles, tout comme ses deux frères et prédécesseurs, Louis X et Philippe V, au décès desquels la question de l’appel des filles à la couronne s’était déjà présentée, et avait été décidée par la cour des pairs à l’avantage des collatéraux mâles, par application de l’ancien usage salique ; mais après Charles le Bel il fallait chercher l’héritier légitime parmi les descendans mâles de prédécesseurs plus éloignés. Le premier en degré parmi eux était Philippe de Valois, petit-fils de Philippe le Hardi, et cousin germain du roi dernier mort. Ce fut lui que la cour des pairs reconnut comme roi, après que la reine épouse du roi défunt eut accouché d’une fille posthume, qui épousa plus tard un fils de Philippe de Valois, le duc d’Orléans. C’est en concurrence de Philippe de Valois que se présenta Édouard III d’Angleterre. Il était, par sa mère Isabelle, petit-fils du roi Philippe le Bel, et rapproché d’un degré sur Philippe de Valois du roi Charles le Bel, qui était frère d’Isabelle. Quoiqu’il eût été déjà décidé que les femmes étaient exclues de la couronne de France par une coutume reconnue comme loi fondamentale, on persuada au roi Édouard de soutenir que, bien que le sexe de sa mère eût dû l’exclure, si elle avait réclamé personnellement la couronne, l’usage salique ne pouvait être appliqué dès que c’était un enfant mâle de la femme appelée à son degré qui prétendait à la succession. Philippe de Valois repoussait cette prétention en alléguant que la mère ne pouvait transmettre un droit dont elle était exclue elle-même. La cause étant portée de nouveau devant la cour des pairs, on y fut unanime à repousser la prétention d’Édouard, et en effet le système anglais n’était soutenable ni en droit, ni en fait. Édouard était obligé d’avouer que les femmes étaient exclues de la couronne de France ; autrement Jeanne, épouse de Philippe d’Évreux, roi de Navarre, devait être appelée au trône comme fille de Louis X le Hutin.