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certaines régions contiguës et soumises par eux à des influences contraires. Que de contrastes ne sortent pas d’une pareille disposition! Les cantons situés sur le revers méridional des grandes chaînes, comparés aux pays placés au pied des pentes septentrionales, en fourniraient au besoin de nombreux exemples; mais les profondes différences inhérentes aux milieux respectifs interdisent ile pousser plus loin l’assimilation. Ce sont bien cependant deux climats sous-marins dont on a constaté l’existence dans le canal situé entre l’Ecosse et les Féroe, deux climats résultant de deux courans contigus. Des sondages pratiqués par le Porcupine en trente-six stations différentes, concordant avec quinze observations analogues dues à l’expédition du Lightning, ont permis de les déterminer aussi sûrement que si on y avait pénétré. La masse chaude coule à l’ouest-sud-ouest, la masse froide à l’est-nord-est du canal. A mesure que l’on s’écarte de la surface, les deux zones se prononcent graduellement; elles sont d’abord peu marquées, mais le contraste ne tarde pas à se manifester.

Dans la zone chaude, l’abaissement de la température s’opère insensiblement; à 200 brasses, les eaux marquent 8°, 2 c. (47° F.); à 400 brasses et jusqu’à 500 ou 600, elles accusent encore un minimum de 7°, 5 c. (46° F.). À cette profondeur, le sol de la zone chaude se compose exclusivement de vase à globigérines, c’est-à-dire de petits animaux de la classe des foraminifères. A 767 brasses, point qui marque la plus grande profondeur qui ait été atteinte dans cette zone, le thermomètre se maintenait encore à 5°, 2 c. (41°’ F.), et cette température n’était inférieure que d’un demi-degré à celle que l’on a constatée à la même profondeur dans le nord du golfe de Biscaye. On le voit, la zone chaude se distingue surtout par une égalité relative très prononcée dans la température de la masse. Très nettement caractérisée entre 150 et 400 brasses, elle l’est déjà moins entre 500 et 700, et, ce que l’on pouvait prévoir, les parties les plus froides sont en même temps les plus basses. Cependant, même à ce minimum de puissance calorique, le contraste est encore, bien marqué avec la zone froide, puisque la température de celle-ci, au-dessous de 200 brasses, s’abaisse rapidement jusqu’à 0° c. (32" F.), et descend même encore plus bas, jusqu’à — 1°, 3 c. (29° F.) entre 300 et 640 brasses. Cette dernière profondeur est la plus grande où l’on soit parvenu dans la zone froide sur un point situé entre les Féroe et les Shetland. Du reste les deux zones s’étendent parallèlement dans le milieu du canal des Féroe. Une assez faible distance, réduite parfois à 20 milles, les sépare; mais la transition de l’une à l’autre peut être encore plus rapide et pour ainsi dire instantanée lorsque le niveau du fond changée brusquement. Il ne faut pas oublier en effet (ce doit être pour nous un fil conducteur)