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qui la continuité des phénomènes de la vie est une vérité incontestable, pour tous ceux en un mot qui repoussent et les destructions en masse et les rénovations subites et générales, les conclusions de M. W. Carpenter paraîtront ne pas manquer de vraisemblance, bien qu’il y ait selon nous quelque chose de trop absolu dans la manière dont l’auteur les a énoncées. Les polycistinés ou radiolés, sortes de foraminifères à test siliceux, ne jouent pas un moindre rôle que les foraminifères proprement dits. Leur coquille présente des prolongemens épineux qui leur donnent un aspect singulier; leur petitesse est extrême; ils constituent des bancs entiers dans les mers froides des deux hémisphères, et se retrouvent jusque dans la Méditerranée. Les diatomées, végétaux microscopiques unicellulaires, pourvus d’un tégument siliceux, rigide, à deux valves plates et exactement conniventes, peuplent aussi le sol sous-marin de leurs dépouilles. On a retiré des diatomées de grandes profondeurs dans les parages du Kamtschatka; elles foisonnent dans les mers australes, sur le parcours du gulf-stream et dans la Baltique. L’inaltérabilité de leur tégument assure partout leur conservation. On a vu cependant que les diatomées ne s’enfonçaient pas au-dessous d’un certain niveau; plus bas, leurs dépouilles peuvent être entraînées, sans que pour cela on doive conclure que ces organismes aient vécu sur place. Les sondages du Porcupine ont constaté l’absence ou du moins l’extrême rareté des diatomées au milieu des boues à globigérines. M. Wallich a prétendu que les diatomées qui persistaient au-delà de 900 mètres de profondeur affectaient une structure moléculaire différente de celle des individus soumis à l’influence de la lumière; s’il en était ainsi, ces végétaux, les plus inférieurs de tous, chez qui l’on remarque même des mouvemens, cesseraient d’agir à la façon des plantes, et participaient de la nature animale. C’est là une opinion singulière qui n’a pas été assez nettement formulée pour qu’on l’adopte sans nouvel examen; mais, dans tous les cas, elle n’est pas en désaccord avec la rareté croissante et l’existence de plus en plus difficile des végétaux, même les plus imparfaits, lorsque l’on pénètre dans les grandes profondeurs. Il est certain que les animaux persistent seuls dans les basses régions; cependant, comme les deux règnes, partout ailleurs en contact, remplissent des fonctions inverses et se suppléent par un échange incessant des élémens de nutrition et de respiration, il est naturel de rechercher avec M. W. Carpenter comment se comportent à ces deux points de vue les animaux des mers profondes entièrement livrés à eux-mêmes.

Le rôle des végétaux, dans l’économie générale du monde organique, consiste d’une part à élaborer la matière brute, puisée direc-