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vaincre des difficultés des deux côtés des Alpes, c’est encore la politique de l’avenir dans l’intérêt des deux pays. Il y a sans doute à Rome et à Florence des hommes qui oublient quelquefois, qui se figurent être de profonds diplomates, de véritables héritiers de Machiavel, parce qu’ils excitent tous les ombrages contre la France, parce qu’ils vont chercher maintenant leur providence à Berlin. Il y a heureusement aussi des hommes qui se souviennent mieux, et lorsque récemment, dans une discussion parlementaire à l’occasion de cette question du percement du Saint-Gothard qui, après avoir fait quelque bruit il y a un an, vient d’être résolue sans qu’on y ait pris garde, lorsque dans cette discussion un orateur, M. Mordini, s’est plu à montrer un danger pour l’Italie du côté de nos frontières, M. Peruzzi a répondu dans un élan d’heureuse et forte inspiration : « On ne doit pas dire qu’il faut regarder nos frontières avec crainte… Quant à moi, je regarde les frontières signalées par l’honorable M. Mordini, et je me rappelle qu’en 1859 elles livrérent passage à un secours généreux, aux soldats de la France qui combattirent avec nous à Magenta et à Solferino… » Ce sont-là ceux qui ont le droit de parler pour l’Italie, parce que ce sont les ouvriers par qui elle existe, et c’est par l’alliance de la France qu’ils ont pu conduire leur œuvre jusqu’au bout.

CH. DE MAZADE.




ESSAIS ET NOTICES.

UN ROMAN SOCIALISTE D’AUTREFOIS.




« N’ayez pas peur, disait M. Sainte-Beuve au début d’une de ses périodiques causeries, je ne viens pas vous entretenir des Lettres d’une Péruvienne. » On sera rassuré sans doute quand nous aurons averti que l’auteur non moins que le livre est le sujet de ces pages destinées à tirer de la nécropole des vieux romanciers une mémoire qui n’est pas indigne de sympathie. Certes cette jeune sauvage de l’illustre sang des Incas n’a pas conservé pour nous le même charme qu’elle avait pour nos arrière-grand’mères. Sa métaphysique prétentieuse nous trouve fort incrédules, surtout quand nous réfléchissons que sa correspondance, avant qu’elle eût appris à écrire, était exprimée avec des nœuds dans des fils de soie. Ses éternelles lettres d’amour à son cher Aza, qui ne peut lui répondre, nous fatiguent parce qu’il n’y a pas de terme à la séparation ; nous regrettons ensuite de nous être intéressés en pure perte quand nous ap-