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alors que de 2 pour 100. Si au contraire cette forêt de 100 hectares, traitée en taillis sous futaie, ne donnait qu’un revenu annuel de 4,000 francs, la valeur du fonds et de la superficie se trouvant réduite à 100,000 francs par exemple, le taux serait de 4 pour 100. Il semble ainsi que dans le taillis et la futaie comparés le taux de placement varie en sens inverse du revenu ; mais cette conclusion ne serait pas exacte en ce qui concerne l’état. En effet, il faut d’abord tenir compte de l’augmentation probable des prix, qui porte surtout sur les bois d’œuvre, et qui peut accroître beaucoup le taux du placement dans les futaies. En outre, si l’abondance des bois de fortes dimensions influe sur le progrès de la richesse générale, la production des bois d’œuvre n’est-elle point pour le trésor une source indirecte de revenus considérables ? Le bon marché du chêne facilite et rend plus économique la distribution des vins ; or les droits de circulation et de débit, les contributions indirectes imposées sur les liquides, se chiffrent par centaines de millions. Et le développement des constructions navales, de quel intérêt n’est-il point pour l’état, pour le trésor même, qui paie directement les vaisseaux de guerre, qui accorde des primes à la grande pêche et des réductions de droits de douane aux importations par navires français ! Toutes les branches de la consommation du bois d’œuvre dans l’agriculture, les arts, l’industrie, multiplient donc indirectement les recettes du trésor, et ajoutent un appoint aux 30 ou 40 millions directement versés par les ventes des coupes de bois domaniaux et portés, souvent seuls et à tort, à l’actif du revenu des forêts de l’état. Est-ce alors 2, 5 ou 10 pour 100 de la valeur des bois sur pied que rapportent à l’état les valeurs engagées dans les futaies ou les réserves des taillis sous futaie, car ce sont les bois d’œuvre qui presque exclusivement contribuent à développer la production générale ? Personne ne peut le dire ; ces résultats ne s’estiment pas en chiffres, pas plus que les services rendus par l’armée, par la justice, par les travaux publics, par toutes les branches de l’administration ; mais ce qui est certain, c’est que, la relation entre le revenu direct et les valeurs engagées étant par exemple de 2 à 100, il serait inexact d’en conclure que les forêts ne rapportent que 2 pour 100 à l’état. Ce n’est cependant ni dans le revenu, ni dans le taux du placement que se trouve pour l’état la vraie raison d’élever des bois d’œuvre et principalement des chênes ; cette raison, c’est que le pays en a besoin, que personne ne peut en produire pour lui à meilleur compte que lui-même, et que nul propriétaire autre que l’état ne peut en créer en quantité suffisante.

Il y a là une exception singulière aux lois générales de la production. L’industrie privée obéit fidèlement à la loi de l’offre et de