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question et maintenir l’état sur les cadres de ses associés comme dûment substitué par l’effet du séquestre ; la régie des domaines déclina cet arrangement et en suscita un autre : elle offrit à la compagnie aux prix du moment la rétrocession des parties confisquées. C’était le seul biais possible ; on l’accepta, La transaction eut lieu, point au nom de la compagnie agissant comme corps et payant avec les deniers sociaux, mais au nom et pour compte de quelques intéressés qui firent les avances nécessaires, à la charge par eux de racheter tractativement les parts des émigrés, ce qui eut lieu sur des bases très équitables. Ainsi, après une tempête où toute autre entreprise eût sombré sans retour, Anzin était encore à flot.

Les cinq années qui suivirent suffirent à peine pour réparer les effets de cet ébranlement. Il fallait d’abord, comme condition d’un régime régulier, ramener à 6 lieues carrées la consistance des exploitations. La tâche était des plus ingrates, et, il faut le dire, on la remplit d’abord tant bien que mal. Une portion de l’ancienne compagnie avait disparu, les traditions ne vivaient plus que dans les souvenirs, quelques titres avaient été égarés, d’autres transportés au chef-lieu du district. Pour beaucoup de détails, il fallait donc s’en remettre à la notoriété publique. D’ailleurs les temps n’étaient pas encore sûrs, et des gens qui s’étaient crus spoliés avaient à peine la conscience de leurs droits ; ils rentraient sans discuter dans les biens qu’on leur restituait, et ne regardèrent pas d’abord à quelques parcelles. Aussi fallut-il en 1799 revenir, par un arrêté du directoire, sur des délimitations fautives, et ce fut seulement alors qu’Anzin fut réintégré dans la consistance entière de son ancien domaine, complété par la restitution des portions qui en avaient été démembrées. Dès lors la compagnie était usufruitière, et, à partir de la loi de 1810, devînt propriétaire incommutable des concessions d’Anzin, de Fresnes et de Raismes. Elle avait celle de Condé et Vieux-Condé par l’association conclue avec M. de Croy en 1757 ; elle a depuis acquis, en 1807, celle de Saint-Saulve à titre onéreux ; elle a obtenu celle de Denain en 1831 pour prix de sa découverte du charbon gras dans cette région, et celle d’Odomez en 1832, peu importante, mais nécessaire pour une meilleure configuration de limites. Tel est l’Inventaire, tels sont les titres de la compagnie, fortifiés par le temps, par une longue possession, et, il faut l’ajouter, par d’opiniâtres controverses.

Est-il croyable que ces droits et ces actes aient jamais pu être discutés ? Ils l’ont été, et à plusieurs reprises. Par où la compagnie d’Anzin était-elle donc vulnérable ? Par un côté qu’elle ne pouvait ni cacher, ni préserver, la notoriété de son succès. On voyait ses dividendes monter, sa production grandir d’inventaire en inventaire ; voilà ce que les envieux ne lui pardonnaient pas. Elle était en butte