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lège qui leur avait fait l’honneur de les nommer dans la construction de son tombeau. « C. Valgius Fuscus, dit une inscription d’une petite ville d’Italie, a donné ce terrain au collège des muletiers de la porte des Gaules pour la sépulture des associés, de leurs descendans, de leurs femmes et de leurs concubines. »

Ainsi dans la plupart des collèges il était d’usage que les associés se faisaient enterrer ensemble; mais indépendamment de ceux qui, fondés pour d’autres intérêts, se construisaient des tombeaux communs, il y en avait dont la sépulture était l’unique affaire et qui n’étaient institués que dans le dessein spécial de fournir à peu de frais une tombe à leurs membres. Ces collèges funéraires, comme on les appelle ordinairement, sont très imparfaitement connus. Ils devaient être fort nombreux; le nom qu’ils prenaient, la façon dont ils étaient constitués, ont sans doute beaucoup varié selon les pays et les époques, — aujourd’hui nous ne pouvons plus distinguer parmi eux avec quelque assurance que deux groupes différens qu’il importe d’étudier à part. Le premier de ces groupes a eu l’avantage de laisser des monumens qui de bonne heure ont attiré l’attention des savans sur lui; on les appelle des colombiers (columbaria) : ce sont des édifices souterrains dans les murs desquels on creusait de petites niches qui contenaient une ou deux urnes. A l’origine, ces columbaria étaient destinés à réunir après leur mort les affranchis et les esclaves des maisons riches. Les serviteurs faisaient partie de la famille aussi, et c’était le devoir d’un maître généreux de ne pas négliger leur sépulture. On a retrouvé celui qui contient tous les affranchis de Livie. Quelquefois des étrangers étaient admis à contribuer aux dépenses du monument, et ils avaient naturellement leur part de propriété quand il était fini. Les gens qui n’avaient pas de tombeau de famille regardaient comme avantageux de trouver place dans ces édifices qui résistaient mieux au temps et à la malveillance qu’une pauvre tombe isolée placée sur le bord d’un grand chemin; aussi prit-on bientôt l’habitude de s’associer pour faire construire un columbarium à frais communs. Ce qui caractérise les associations de ce genre, c’est qu’on ne les appelle pas des collèges, mais des sociétés, et que ceux qui les composent se contentent de prendre le nom général de socii sans y rien ajouter. En réalité, elles sont tout à fait organisées comme les collèges ordinaires : la société a ses administrateurs qui font construire le columbarium, ses questeurs chargés de surveiller la caisse commune, ses décurions parmi lesquels on trouve quelquefois des femmes. Le monument achevé, on se partage les places : chacun reçoit un certain nombre de niches, suivant sa mise de fonds; s’il en a trop pour son usage, il les donne ou les vend, — il se faisait là, comme dans les catacombes chrétiennes, un véritable commerce de tombes. L’ache-