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de l’écorce terrestre. Reconnaître les limites de ces mers anciennes, les figurer sur une carte paléogéographique, n’était point une œuvre facile ; M. Delesse l’a tentée, et, grâce aux travaux des géologues qui ont étudié le sol français depuis Brongniart, Cuvier et d’Omalius d’Halloy jusqu’à nos jours, il a pu dessiner cinq cartes où ces mers sont délimitées avec une approximation suffisante.

Considérons d’abord l’époque la plus ancienne. Les roches granitiques seules sont émergées. La mer qui les entoure dépose dans son sein les premières couches stratifiées, appelées siluriennes. Ces dépôts sont des schistes et des grès formés aux dépens des roches granitiques. Les couches siluriennes étant presque partout en France recouvertes de dépôts plus récens, il est difficile de tracer exactement les contours de la plus ancienne des mers géologiques, la mer silurienne ; cependant M. Delesse l’a essayé en se bornant à marquer les parties qui ont conservé des traces des dépôts de cet âge. La partie émergée de la France se bornait alors à une large bande partant de la pointe du Finistère et dirigée, en s’élargissant d’abord, vers le sud-est, dans le Poitou et le Limousin, puis vers le nord-ouest, où elle s’étendait de la Bavière rhénane jusqu’au département du Var. Quelques îlots granitiques surgissaient dans l’Aveyron, les Cévennes et les Pyrénées. Une seconde carte figure la mer triasique : elle est trop compliquée pour pouvoir être décrite ; la vue seule peut donner une idée des contours sinueux de cette mer géologique. Celle qui lui succède, la mer liasique, marque une date importante : c’est le commencement de l’époque secondaire, celle des terrains jurassiques : des couches calcaires et crétacées, qui composent une grande partie de notre sol. cette mer couvrait tout le nord et le sud-ouest de la France. Le rivage septentrional formait une ligne presque droite allant de Boulogne à Luxembourg. Les Vosges s’avançaient vers le sud comme une grande presqu’île, mais tout le pays situé entre Luxembourg et Poitiers d’un côté, Le Havre et Genève de l’autre, était sous l’eau. Deux grandes îles surgissaient dans la mer liasique : l’une comprenant les deux presqu’îles du Finistère et du Cotentin et une partie du Poitou, l’autre tout le plateau central de l’Auvergne, depuis La Châtre jusqu’à Alais. Un détroit, au milieu duquel est située la ville de Poitiers, séparait ces deux grandes îles. Au sud du plateau central les Cévennes constituaient une île plus petite séparée de la grande par un détroit sinueux qu’occupent actuellement les villes de Rodez, de Mende, de Milhac et de Saint-Affrique. Les Pyrénées et les montagnes du Var surgissaient des eaux et formaient également des îles de grandeur diverse.

Arrivons aux temps modernes de la géologie. Les terrains secondaires sont déposés, la France presque tout entière est émergée. Cependant un grand golfe. communiquant avec la Mer du Nord, qui recouvre la partie septentrionale de la Belgique, s’étend de Dunkerque à Nemours et des Andelys à Épernay. Paris, Melun, Beauvais, Laon, Cambrai,