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obligée de reculer et commence à se troubler. L’amiral, avec une indomptable énergie, rétablit l’ordre, ranime le courage de ses jeunes soldats, les ramène à l’assaut et reprend le village, où il défie les retours offensifs.

Sur toute la ligne, on avait gagné du terrain lorsque la nuit tombait, laissant nos soldats maîtres des positions si vivement disputées. Le fait est que les Bavarois battaient de toutes parts en retraite. On ne voyait rien dans l’obscurité, au milieu de la pluie et de la neige, qui commençaient à tomber ; ce n’est que le lendemain matin que l’amiral Jauréguiberry, saisissant le premier la portée de la défaite de l’ennemi, lançait à sa poursuite le peu de cavalerie qu’il avait pour son escorte avec son chef d’état-major, le commandant Lambilly, qui atteignait un convoi allemand, lui prenait deux pièces d’artillerie attelées, vingt-cinq caissons de munitions, trente voitures de bagages, plus un certain nombre de prisonniers.

Si honorable que fût la bataille de Coulmiers, deux choses avaient manqué pour en faire un succès peut-être décisif. La cavalerie du général Reyau, qui avait pour instruction de couvrir le flanc gauche de l’armée et de s’avancer de façon à couper la retraite de l’ennemi sur la route de Paris, n’avait pas rempli sa mission. Le général Reyau avait commencé par s’engager dans un combat d’artillerie assez inutile, où ses escadrons s’étaient brisés sans résultat et d’où ils étaient sortis fort éprouvés ; puis, sur la foi d’une reconnaissance un peu effarée, il avait pris pour des masses allemandes ce qui était tout simplement le corps des francs-tireurs de Lipowski, et il s’était replié sur les positions qu’il avait quittées le matin, de sorte que le soir la cavalerie n’était plus là pour se mettre à la poursuite de l’ennemi. Ce n’était pas tout, le général Martin des Pallières, qui devait avoir un rôle essentiel dans l’opération, se trouvait n’avoir servi à rien, et ce n’était pas sa faute. Il avait exécuté fidèlement ses instructions ; il était parti dès le 7, il avait passé la Loire sans rencontrer la moindre résistance, et il est même vraisemblable que son mouvement était ignoré des Allemands. Le 8, le général des Pallières était à Châteauneuf ; le 9, dans la matinée, il arrivait à la hauteur de la grande route d’Orléans à Pithiviers, croyant toujours avoir jusqu’au 11, lorsque tout à coup il entendait au loin une formidable canonnade qui le plongeait dans la plus cruelle perplexité. Un instant, il eut la pensée de changer sa direction et de se jeter vers Artenay, pour aller se placer derrière l’ennemi, sur la route d’Étampes ; son instinct de soldat l’y poussait. C’était cependant de sa part une résolution grave avec de jeunes soldats et dans l’ignorance où il était des conditions où s’était engagée cette bataille qu’il n’attendait que pour le