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sultat facile à prévoir. La compagnie Marseille-Alger-Malte s’est entièrement liée avec le groupe Falmouth-Bombay ; au lieu de se faire concurrence, les deux intérêts se sont confondus dans un traité commun.

Pendant que la ligne méditerranéenne s’établissait, une autre grande voie s’ouvrait dans le nord, non plus cette fois pour atteindre directement les Indes, mais pour gagner l’extrême Orient. A l’époque où les échecs multipliés des entreprises atlantiques avaient discrédité la télégraphie sous-marine, on s’était préoccupé de réunir les deux mondes par la Sibérie et l’Amérique russe; c’était un tracé qui, tout en présentant ses difficultés et ses dangers, paraissait cependant plus sûr que les trajets maritimes. Le réseau moscovite pénétra donc en Asie, et dès l’année 1866 il atteignit Nicolaïef, à l’embouchure du fleuve Amour, poussant en même temps sur Kiakhta un embranchement qui amorçait un service avec la Chine. De nouveaux intérêts vinrent se grouper autour de ce tracé, et un courant télégraphique s’établit à travers les états Scandinaves et moscovites. La Great northern telegraph Company, ayant son siège à Copenhague, établit une première ligne qui joignait l’Angleterre au Danemark, puis venait atterrir à la rive baltique de la Russie et gagnait ensuite Moscou; une seconde ligne, doublant cette première, reliait l’Ecosse à la Norvège, traversait la péninsule scandinave, franchissait la Baltique pour toucher Saint-Pétersbourg et gagner également Moscou. Bientôt une autre société vint greffer ses lignes sur ce grand tracé septentrional à l’extrémité orientale de la Sibérie. C’est la Great northern China and Japan extension Company, qui a également son siège à Copenhague, et que nous avons déjà rencontrée tout à l’heure; c’est elle qui, dans ces deux dernières années, a placé dans les mers du Japon des câbles qui joignent la côte sibérienne au sud de la Chine, et établissent de cette façon un circuit fermé entre les deux grands trajets du nord et du midi. Ainsi par une voie détournée une nouvelle concurrence naissait pour les lignes indiennes. Les dépêches adressées au Japon, celles même qu’on envoyait à Bombay, à Madras, à Calcutta, pouvaient aller chercher leur route à travers les neiges de la Sibérie.

Entre la voie méditerranéenne et le tracé scandinavo-sibérien est venue encore se placer une ligne instituée dans des conditions toutes spéciales et dont nous avons eu déjà l’occasion de parler. On sait qu’une compagnie dite Indo-European s’est formée, dès le mois d’avril 1868, sous la protection de l’Allemagne du nord et de la Russie, pour joindre l’Angleterre aux Indes par voie terrestre. Sa ligne, partant d’Emden, en Hanovre, où atterrit un câble anglais, traverse l’Allemagne en écharpe, gagne Varsovie, puis Odessa,