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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/454

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ce fut pour lui communiquer son activité de corps et d’esprit.

La séparation de l’Orient et de l’Occident, accomplie à la mort de Théodose (395), mais dissimulée pendant longtemps sous le nom d’unanimité, unanimitas, permit à Constantinople et à l’Orient tout entier de suivre son irrésistible penchant. Les questions politiques cédèrent définitivement le pas aux questions religieuses ; du forum, la vie publique passa dans le sanctuaire. Les disputes théologiques partagèrent dorénavant avec les jeux du cirque le privilège de soulever les passions. Le clergé, arbitre de la foi et des consciences, s’éleva au-dessus de toutes les classes, sans que la moindre protestation se produisît. Une ambition effrénée s’empara de lui. La guerre sévit dans ses rangs et conséquemment dans le peuple. La capitale, l’empiré, furent profondément troublés. Au sortir de cette anarchie, quelques traits nouveaux vinrent s’ajouter à la physionomie, déjà nettement accusée, du régime byzantin. Nous insisterons sur ces événemens parce qu’ils précisèrent et achevèrent ce régime.


IV

C’est cette crise décisive que nous retrace l’historien de Saint Jean Chrysostome. — Élève de Libanius et citoyen d’Antioche, Chrysostome était à la fois un rhéteur et un démocrate. Avec moins de vertu et de mépris des biens de ce monde, il eût été un démagogue et aurait entraîné derrière lui tout un peuple enflammé par son éloquence. Son élévation au siège de Constantinople fut le caprice du ministre Eutrope ; mais dans une capitale qui avait vu tant de parvenus glorieux ou honteux, où un eunuque était comte de la chambre sacrée, la fille d’un chef barbare impératrice, Chrysostome, supérieur à tous par son génie et par la pureté de sa vie, n’était nullement un déclassé. Il pouvait regarder en face cette aristocratie administrative qui peuplait les splendides demeures de Constantinople. Il allait demander un compte sévère à cette société, à cette église corrompue.

Chrysostome comprit que, pour ramener au devoir cette église et cette société, il lui fallait assurer l’autorité de son siège patriarcal dans la Thrace et dans l’Asie-Mineure, — soumettre à son contrôle, sinon à sa juridiction, les patriarcats d’Alexandrie et d’Antioche, et conséquemment tous les évêchés de l’Orient, — exercer une censure sévère à l’égard des actes officiels ou privés de l’empereur, de l’impératrice et des ministres.

Il y avait dans l’empire d’Orient trois grandes capitales ecclésiastiques, et par conséquent trois régimes religieux distincts, trois