des grandes choses. » Restée veuve après une bien courte union, disposant d’une immense fortune, elle était connue de tous pour sa charité. On peut croire que l’amitié de cette jeune femme, si naturellement et si aisément modeste, charitable et clémente, ne fut pas sans influence sur l’âme enthousiaste, irascible et fière de Chrysostome. Elle donna au solitaire du Liban, à l’imitateur des prophètes d’Israël, au prêtre démocrate d’Antioche, au patriarche indompté de Constantinople, l’exemple de vertus plus douces, plus sociables, et par conséquent plus chrétiennes. C’est cet exemple qui le soutint dans ses plus cruelles épreuves.
Si Chrysostome dut beaucoup à Olympias, celle-ci lui fut également redevable des plus précieuses consolations. La noble diaconesse de Sainte-Sophie, aussitôt après l’exil de Chrysostome, fut atteinte d’une maladie qui prenait parfois chez les Byzantins un développement inusité. Cette maladie, c’est la mélancolie. La nostalgie, l’hypocondrie, la mélancolie, s’attaquent de préférence aux individus et aux peuples chez qui domine la sensibilité.
Les lettres que le patriarche écrivit à la diaconesse sont d’un prix inestimable pour le physiologiste et pour le psychologue, qui y trouvent, analysés par un connaisseur du cœur humain, tous les symptômes de l’hypocondrie byzantine. Lui-même les avait étudiés dans la Bible et dans l’Évangile : « un cœur flétri par le chagrin, des yeux abattus et languissans, une âme consumée de douleur. » Elie, dans un état pathologique bien caractérisé, s’écriait : « Mon Dieu, reprends mon âme, je te la rends. » Jésus lui-même, sous le coup d’une odieuse trahison, disait : « Mon âme est triste jusqu’à la mort. » Et Chrysostome interpellait ainsi Olympias : « O ma sœur, vous voulez mourir, je le vois bien ! » Des symptômes, l’archevêque remonte aux causes. Il en signale une toute chrétienne, le scandale. « Le scandale’, — dit M. Amédée Thierry, qui a sondé tous les replis d’une société si différente de la nôtre, — le scandale est l’état d’une âme qui, troublée dans sa confiance en Dieu par des incidens extérieurs qu’elle ne comprend pas, met son jugement faillible au-dessus de la foi, et se laisse ainsi détourner de la vraie voie. » La seconde cause, plus générale, de tous les temps et de tous les pays, c’est l’absence, « le plus cruel des maux, » si nous en croyons un profond moraliste. « Je n’entendrai plus, disait Olympias, la parole de Dieu descendre de ces lèvres d’or, ses plus dignes interprètes. »
On comprend que dans de tels accidens il fallait être psychologue pour être un bon médecin ; mais les seuls psychologues du bas-empire, c’étaient les confesseurs. A eux appartenait exclusivement désormais ce genre dit consolatoire, où avaient excellé les