admission aux carrières civiles. On le voit, les dissentimens de principes n’étaient pas bien profonds entre les deux partis qui se disputaient la présidence, et c’étaient les questions de personnes qui évidemment les divisaient le plus.
Ce n’est pas ainsi que l’entendaient les hommes convaincus du parti libre-échangiste et du parti démocratique ; aussi leur opposition à la convention de Cincinnati se prononçait-elle chaque jour davantage. Peu après les événemens de Philadelphie, les free-traders eurent un grand meeting à New-York sous la présidence de M. Cullen Bryant, poète et économiste distingué, et rédacteur en chef du New-York-Post. Il y avait environ 2,000 personnes présentes. Plusieurs discours très vifs furent prononcés contre la candidature de M. Horace Greeley et contre l’absence de principes et d’idées sérieuses qui régnait depuis trop longtemps dans les grands partis politiques. Le président dit que les lois d’impôts des États-Unis étaient devenues un assemblage d’abus grossiers. Le professeur Perry, attaquant à la fois Horace Greeley et le général Grant, déclara dans un langage pittoresque que les hommes sensés ne voulaient plus avoir pour symbole du pouvoir exécutif « ni une baïonnette enveloppée de fumée de cigare (on sait que le général Grant est un fumeur déterminé), ni un président occupé à arroser les choux du jardin exécutif » (par allusion aux goûts champêtres et horticoles de M. Horace Greeley). M. David Wells, un des premiers financiers des États-Unis, s’écria « qu’il était grand temps que les candidats à la présidence eussent d’autres mérites que de fendre du bois (comme le président Lincoln), de porter des chapeaux gris. (comme M. Greeley), de savoir raccommoder des vieilles culottes (comme le président Johnson, ancien garçon tailleur), ou de se griser de temps à autre ; » cette dernière méchanceté, destinée peut-être au général Grant, pouvait aussi bien s’appliquer à d’autres. Des résolutions furent votées, déclarant que, les questions politiques nées de la guerre et de l’esclavage étant vidées à jamais, « le besoin se faisait sentir d’une politique basée sur les intérêts matériels et sur les réformes pratiques, financières et civiles, » que dans le relâchement des anciens liens de partis « la convention de Cincinnati avait été considérée avec espoir comme devant réaliser ce programme, qu’elle avait elle-même proclamé ; » mais qu’ayant manqué à ses promesses elle avait désappointé tous les hommes de sens. Des pouvoirs furent enfin donnés au président du meeting pour composer un comité de dix membres chargés d’aviser aux moyens de faire prévaloir le véritable programme du parti libéral.
Quelques jours plus tard, une conférence de libres échangistes fut convoquée à New-York pour examiner s’il n’était pas possible d’unir plus étroitement toutes les opinions contraires à