considération du travail qu’il fait dans la Bibliothèque du roi. » De son côté, l’abbé de Marolles reconnaît, dans les termes rapportés plus haut, avoir reçu une somme de 2,400 livres payée « à deux fois, par gratification » et en sus du prix de la vente. Quel pouvait être le motif de cette gratification, sinon celui que nous trouvons consigné dans les comptes des bâtimens, et, d’autre part, en quoi pouvait consister ce « travail fait à la Bibliothèque du roi, » sinon en opérations préalables de répartition et de classement ?
Quoi qu’il en soit, et par quelques mains que les choses aient été faites, tout se trouvait achevé au bout de deux années. Les recueils provenant du cabinet de Marolles, magnifiquement reliés en une suite de volumes in-folio aux armes et au chiffre du roi, prenaient place sur les rayons de la Bibliothèque à côté des livres imprimés, en attendant le jour où, d’autres collections étant venues grossir ce noyau du futur département des estampes, on serait obligé d’attribuer à la collection primitive et à ses annexes un emplacement plus vaste et un régime administratif séparé.
La plupart des volumes de la collection de Marolles subsistent encore à la Bibliothèque tels qu’ils avaient été originairement constitués. Si quelques-uns ont dû être en partie dépouillés de leur contenu, parfois même absolument reformés, — soit lorsqu’il s’agissait de compléter ailleurs l’œuvre d’un maître, soit lorsque des rapprochemens plus ou moins hasardés couraient le risque d’entretenir la confusion ou l’erreur, — combien d’autres dont les dehors comme les feuillets intérieurs ont gardé depuis deux siècles la même physionomie ! Chacun connaît ces volumes vénérables, consacrés à la fois par le talent des maîtres dont ils nous transmettent les enseignemens et par les études successives de plusieurs générations d’artistes ou d’érudits. Quel peintre, quel graveur, quel historien de l’art ne les a consultés cent fois ? Quel visiteur même, entré accidentellement à la Bibliothèque, ne s’est pris à les contempler avec un respect instinctif, et n’a deviné, ne fût-ce qu’en jetant les yeux sur le maroquin usé qui les recouvre, le crédit dont ils n’ont cessé de jouir et les longs services qu’ils ont rendus ? Il serait donc superflu d’insister. La valeur et l’utilité des recueils formés par l’abbé de Marolles ressortent de leurs élémens mêmes aussi bien que des souvenirs attachés à ce nom. Qu’il nous suffise d’avoir indiqué quelque chose des faits relatifs à l’installation de cette collection célèbre dans la Bibliothèque du roi, et de rappeler qu’après avoir été l’origine et le fondement de notre grand dépôt national, elle en est restée jusqu’à ce jour une des gloires principales, un des trésors que nous avons le droit d’opposer avec le plus d’orgueil aux