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l’organisme, est exactement égale à la somme de chaleur développée par l’animal dans un temps correspondant. Cette somme fut estimée d’après le poids de glace fondue par l’animal placé dans un calorimètre. Lavoisier reconnut de la sorte qu’une telle égalité n’existe pas ; il ne s’en étonna pas longtemps, car il découvrit bientôt que, sur 100 parties d’oxygène atmosphérique absorbées, 81 seulement sont rejetées par la respiration sous forme d’acide carbonique. Il en conclut alors que le phénomène n’est pas simple, qu’une portion d’oxygène (9 sur 100) est employée à brûler de l’hydrogène pour former la vapeur d’eau contenue dans l’air expiré. La chaleur animale devait donc être attribuée à une double combustion, de carbone d’abord, puis d’hydrogène, et la respiration considérée comme rejetant au dehors de l’animal de l’acide carbonique et de la vapeur d’eau.

Les expériences de Lavoisier ont été reprises et modifiées, ses conclusions ont été discutées de bien des manières depuis bientôt cent ans. Plusieurs expérimentateurs en ont rectifié ou complété quelques points, mais la doctrine générale n’a pas été ébranlée par les difficultés secondaires et de nature fort délicate qu’on y a reconnues, et dont plusieurs arrêtent encore les physiologistes. Il est incontestable en effet que la plus grande partie des réactions qui s’opèrent dans l’économie en y produisant de la chaleur a pour résultat définitif la vapeur d’eau et l’acide carbonique exhalés par le poumon ; mais ces deux gaz ne peuvent provenir d’une combustion directe d’hydrogène et de carbone, puisque l’économie ne renferme pas de tels corps à l’état de liberté. Ils ne représentent en réalité que le terme d’une série de métamorphoses souvent distinctes des combustions proprement dites. D’autre part, ils ne sont pas les seuls résidus du travail chimique qui s’accomplit dans le fourneau vital. Outre l’eau et l’acide carbonique que les animaux rejettent dans l’expiration, et qui sont comme les fumées de l’élaboration nutritive, ils excrètent par d’autres voies certains principes qui en sont comme les scories. Or ces principes de désassimilation, parmi lesquels il faut citer l’urée, l’acide urique, la créatine, la cholestérine, etc., ne sauraient être le résultat de combustions pures, et ils témoignent que le torrent circulatoire est le siège de réactions extrêmement multiples dont nous commençons seulement à entrevoir les lois.

Les progrès les plus récens de la chimie organique permettent en effet de suivre l’enchaînement des transformations graduelles des matières nutritives dans le cycle des opérations vitales. Tout d’abord il convient de préciser le siège de ces phénomènes. Ils s’accomplissent dans tous les points de l’économie parcourus par les vaisseaux