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pour avoir la certitude d’une part que toutes les matières achetées ont été apportées dans les arsenaux, d’autre part que l’état n’a payé que les livraisons réellement faites.

Ce mode de contrôle n’est pas seulement précieux pour l’administration de la guerre, à laquelle il fournit le moyen d’exercer une surveillance plus étroite sur la fidélité de ses agens. C’est au pays surtout, c’est aux pouvoirs politiques qu’il apporte une lumière nouvelle et des garanties inconnues. L’assemblée nationale pourra suivre avec certitude la consommation des crédits du matériel. Il ne sera plus permis de rien prélever sur l’allocation des approvisionnemens au profit d’expériences et de dépenses non autorisées. Le budget de la guerre arrivera presque à ressembler à la célèbre maison de verre, et chacun pourra voir se dérouler toute la gestion du ministre et la série de ses actes financiers. On enlèvera ainsi tout prétexte à ces défiances qu’inspire au public l’emploi des centaines de millions affectées chaque année à notre établissement militaire ; on donnera enfin au pays le moyen d’avoir dans la main tout ce qui concerne la guerre. Tout en effet, au point de vue financier, se rattache à deux grandes causes : le personnel, le matériel. Que l’assemblée fasse précéder chaque année la loi du budget d’une loi spéciale qui fixera l’effectif ; l’établissement du budget se fera d’une façon plus facile, plus exacte et plus conforme à la volonté du pouvoir législatif. L’effectif une fois déterminé, rien n’est plus aisé que de calculer la dépense qui en résulte, au moyen des tarifs qui indiquent ce que coûte chaque officier, chaque soldat, chaque fantassin, chaque cavalier. Après avoir arrêté les crédits de l’effectif, on sera mieux en mesure d’apprécier ce qu’on veut allouer aux approvisionnemens. De cette façon, l’administration et l’assemblée marcheront d’un pas plus ferme et plus sûr non-seulement pour la demande et le vote des crédits, mais pour le contrôle de la dépense. Si la loi d’effectif forme pour le budget la plus solide des basés, elle fournit encore les meilleurs éléments pour apprécier l’exactitude des comptes que rend le ministre. Un simple rapprochement du nombre d’hommes votés avec le nombre d’hommes entretenus d’après les états de présence suffit pour constater le régulier emploi des crédits du personnel ; quant aux approvisionnemens, on n’aura qu’à se reporter au compte-matières pour s’assurer que les sommes dépensées se retrouvent dans le matériel des arsenaux.

On le voit, la corrélation introduite dans la comptabilité-matières de la guerre à une portée supérieure à la simple modification d’un détail de comptabilité. Comme l’ensemble de la réforme, elle est le résultat d’un effort honnête auquel on ne saurait trop applaudir. Le