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vivement affecté n’était pourtant pas de complexion délicate : Guarini eut, dit-on, vingt-trois fils.

Ce serait une grave erreur de croire que toutes ces belles nuances métalliques qui diaprent les plumes des oiseaux et les ailes des papillons sont, dues à des pigmens : rêve d’alchimiste que de chercher à les extraire ! Elles ont pour cause unique des jeux de lumière, fugitifs comme les feux du diamant. Quand on examine avec le microscope une plume à reflet métallique de la gorge du colibri, on est tout d’abord étonné de ne rien voir des magnifiques nuances dont on voulait pénétrer le mystère. Elle est tout simplement faite d’une substance brune, opaque, presque autant qu’une plume d’oie noire. On remarque toutefois un agencement spécial : la barbe, au lieu d’une tige effilée, offre une série de petits carrés de substance cornée, bout à bout. Ces plaques larges de quelques centièmes de millimètre sont extrêmement minces, brunes et toutes d’apparence semblable, quel que soit le reflet qu’elles donnent. Les grandes plumes brillantes du paon sont faites de même ; les plaques sont seulement plus espacées, et l’éclat est moindre. On a décrit celles-ci comme autant de petits miroirs ; mais la comparaison n’est pas exacte, car alors elles renverraient simplement la lumière sans la colorer. Elles n’agissent pas non plus en décomposant les rayons qui les traversent, car alors elles ne perdraient point leur irisation dans le champ du microscope, et d’ailleurs elles sont trop peu transparentes. L’éclat de ces plaques n’a donc rien de commun avec celui des lames minces, comme la paroi d’une bulle de savon ou la goutte d’huile comprimée entre deux verres un peu convexes. On a en pareil cas une teinte irisée bien distincte de l’éclat métallique des plumes du colibri, et c’est aux métaux que nous devons demander une comparaison plus exacte. La nature de la surface des plaques de la plume produit seule ces reflets semblables à ceux de l’acier trempé, ou du bismuth cristallisé, ou des beaux échantillons de fer oligiste qu’on rapporte de l’île d’Elbe. Cet état de surface, peut-être dû à des élévations et dépressions insaisissables pour nos meilleurs instrumens, est encore inconnu. Peut-être les mathématiciens pourront-ils le déduire de la qualité même des reflets ; mais cette étude, — que nous sachions, — n’a point été faite. Certains colibris semblent particulièrement favorables à cette recherche, émettant des couleurs d’une pureté assez grande et variables sous des angles déterminés, la même plume rouge écarlate devenant, quand on la tourne à 90 degrés, d’un beau vert d’émeraude.

Le procédé que suit la nature pour les colibris est aussi celui qu’elle met en œuvre sur l’aile des papillons. Celle-ci est recouverte d’écailles microscopiques qui semblent jouer le même rôle que les